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France : Saint-Laurent : Arrêt automatique du réacteur 2, erreurs à répétition, culture de sûreté lacunaire et conscience insuffisante des risques




20 janvier 2018


Le 19 janvier 2018, le réacteur 2 de la centrale nucléaire de Saint-Laurent-des-Eaux s’est arrêté automatiquement. Le même jour, l’ASN communique sur un évènement datant d’octobre 2017 concernant le même réacteur, passé discrètement sous silence par l’exploitant. Et pour cause ! Culture de sûreté lacunaire, conscience du risque insuffisante et oublis répétés de vérifications sont pointés du doigts par l’Autorité de sûreté nucléaire. En effet, lors de contrôles de matériels de protection du cœur durant le dernier arrêt pour rechargement du combustible, les équipes ont commis plusieurs erreurs qui ont conduit à déclencher l’arrêt automatique du réacteur 2.


Un arrêt automatique de réacteur nucléaire n’est jamais bon signe. C’est une procédure déclenchée automatiquement lorsqu’une situation anormale est détectée, qui vise à protéger le cœur du réacteur et à arrêter la réaction nucléaire.

Le 19 janvier 2018, le réacteur 2 de la centrale de Saint-Laurent-des-Eaux s’est arrêté automatiquement. L’exploitant a, comme il se doit, informé l’Autorité de sûreté nucléaire ainsi que les pouvoirs publics, mais n’a pas fourni d’explications dans sa communication au public. Seul détail qu’EDF consent à livrer : "Les opérateurs de la centrale ont conduit l’installation conformément aux procédures et réalisent actuellement un diagnostic pour préciser l’origine de cet arrêt." Le réacteur a redémarré le lendemain, mais là non plus, aucune explication. Force du hasard ? Le jour de l’arrêt automatique du réacteur 2 c’est le jour qu’a choisi l’ASN pour communiquer sur un évènement datant d’octobre 2017 concernant le même réacteur. On apprend alors que les équipes ont par erreur déclenché un arrêt automatique du réacteur 2 alors qu’elles procédaient à des contrôles de matériels de protection du cœur. L’ASN le dit clairement : cet évènement démontre une culture de sûreté lacunaire et une conscience insuffisante des risques. On peut dès lors se poser de sérieuses questions quant aux capacités des équipes à respecter les procédures de conduite si bien mises en avant dans la communication de l’exploitant. Initialement déclaré au niveau 0 (c’est à dire, n’étant même pas un incident selon l’exploitant), l’Autorité de sûreté nucléaire a imposé que l’évènement soit reclassé au niveau 1.

Ce que dit l’ASN :

Le 19/01/2018

Non-respect d’une procédure de contrôle des matériels de protection du cœur ayant conduit à un arrêt automatique du réacteur

Le 18 octobre 2017, l’exploitant de la centrale nucléaire de Saint-Laurent-des-Eaux a déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) un événement significatif pour la sûreté relatif à l’émission du signal d’arrêt automatique du réacteur 2.

Les réacteurs sont protégés par des automatismes déclenchant un arrêt de la réaction nucléaire lorsqu’une situation anormale est détectée. Cet arrêt est réalisé par l’introduction, par gravité, des barres de contrôle ayant pour effet de stopper immédiatement la réaction en chaîne. Dans le cas présent, l’installation étant à l’arrêt et les barres de contrôle étant déjà complètement insérées, ce signal n’a pas eu de conséquences.

Lors de l’arrêt pour rechargement du combustible du réacteur 2, les équipes d’EDF ont procédé à des réglages des chaînes de mesure de puissance. Ces opérations consistent notamment à activer puis désactiver successivement les différents automates de protection. Pour éviter un déclenchement intempestif, l’arrêt automatique du réacteur ne se déclenche que lorsqu’au moins deux automates envoient simultanément l’ordre d’arrêt. Après l’activation d’un premier automate, les opérateurs n’ont pas vérifié que celui-ci avait bien été désactivé et avait cessé de transmettre l’ordre d’arrêt, et ce alors que la procédure prévoit trois contrôles indépendants. Lors de la poursuite des opérations de réglage, qui ont provoqué l’activation d’un second automate alors que le premier n’avait pas été désactivé, l’arrêt s’est automatiquement déclenché.

L’examen a posteriori des circonstances de l’évènement a mis en évidence que la culture de sûreté était lacunaire et que les intervenants n’avaient pas une conscience suffisante du risque. Cet évènement n’a pas eu de conséquence sur la sécurité des travailleurs ou l’environnement.

Compte tenu des omissions répétées dans les vérifications opérées par les intervenants caractérisant un défaut de culture de sûreté, cet événement a été reclassé au niveau 1 de l’échelle internationale des événements nucléaires INES par l’ASN.

https://www.asn.fr/Controler/Actualites-du-controle/Avis-d-incident-des-installations-nucleaires/Non-respect-d-une-procedure-de-controle-des-materiels


Ce que dit EDF :

  • Déclaration d’un événement de niveau 1 (échelle INES) lié à l’émission d’un ordre d’Arrêt automatique réacteur au cours d’une opération de maintenance en arrêt

Le 20/01/2018

Le 16 octobre 2017, les équipes de la centrale de Saint-Laurent procèdent à la réalisation d’essais périodiques sur les chaînes de mesure de flux neutronique [1] (chaînes « RPN ») de l’unité de production n°2, alors à l’arrêt pour maintenance. Ces chaînes RPN ne sont pas utilisées lorsque que l’unité est à l’arrêt en raison d’absence de flux.

Lors de ce type d’essai, plusieurs alarmes apparaissent automatiquement en salle de commandes. Elles doivent alors être contrôlées par les intervenants au fur et à mesure de l’avancement de l’essai.

Le premier essai sur les chaînes RPN a été réalisé et validé. Lors de la réalisation du deuxième essai, une nouvelle alarme est apparue, non liée directement à l’activité en cours. Elle concernait un défaut sur un composant électronique du système de commande des grappes [2]. Cette alarme n’a pas été immédiatement identifiée par les intervenants. La réalisation du troisième essai cumulée avec cette alarme a entraîné un ordre d’Arrêt automatique réacteur, sans impact sur le fonctionnement de l’installation, le réacteur étant à l’arrêt et les grappes déjà insérées.

Cet événement n’a eu aucune conséquence sur la sûreté des installations, sur l’environnement ni sur la sécurité du personnel.

Il a été déclaré à l’Autorité de sûreté nucléaire comme un Evénement significatif sûreté de niveau 0 sur l’échelle INES qui en compte 7. Néanmoins, après échanges et à la demande de l’Autorité de sûreté nucléaire, le CNPE a requalifié le 9 janvier 2018 cet événement au niveau 1 sur l’échelle INES.

https://www.edf.fr/groupe-edf/nos-energies/carte-de-nos-implantations-industrielles-en-france/centrale-nucleaire-de-saint-laurent-des-eaux/actualites/declaration-d-un-evenement-de-niveau-1-echelle-ines-lie-a-l-emission-d-un-ordre-d-arret-automatique-reacteur-au-cours-d-une

  • L’unité de production n°2 reconnectée au réseau électrique national

Le 20/01/2018

À 1h45 dans la nuit du samedi 20 janvier, l’unité de production n°2 a été reconnectée au réseau électrique.

Vendredi 19 janvier, à 9h48, l’unité de production n°2 de la centrale de Saint-Laurent s’est arrêtée automatiquement, conformément aux dispositifs de sûreté et de protection du réacteur.

Après avoir réalisé le diagnostic et les analyses, les équipes ont pu procéder au redémarrage de l’unité de production en toute sûreté. Elle est de nouveau disponible sur le réseau depuis 1h45 dans la nuit du samedi 20 janvier.

Cet arrêt de courte durée n’a eu aucune conséquence sur la sûreté des installations ni sur l’environnement. Les pouvoirs publics, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) ont été informés.

Les deux unités de production de Saint-Laurent sont connectées au réseau électrique national.

https://www.edf.fr/groupe-edf/nos-energies/carte-de-nos-implantations-industrielles-en-france/centrale-nucleaire-de-saint-laurent-des-eaux/actualites/l-unite-de-production-ndeg2-reconnectee-au-reseau-electrique-national

  • Arrêt automatique du réacteur de l’unité de production n°2

Le 19/01/2018

Vendredi 19 janvier, à 9h48, l’unité de production n°2 de la centrale de Saint-Laurent s’est arrêtée automatiquement [3], conformément aux dispositifs de sûreté et de protection du réacteur.

Les opérateurs de la centrale ont conduit l’installation conformément aux procédures et réalisent actuellement un diagnostic pour préciser l’origine de cet arrêt.

Cet événement n’a aucune conséquence sur la sûreté des installations. L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et les pouvoirs publics ont été informés de cet événement.

https://www.edf.fr/groupe-edf/nos-energies/carte-de-nos-implantations-industrielles-en-france/centrale-nucleaire-de-saint-laurent-des-eaux/actualites/arret-automatique-du-reacteur-de-l-unite-de-production-ndeg2


[1Le système RPN assure la surveillance permanente de la puissance du réacteur à partir de mesures de flux neutronique effectuées par l’intermédiaire d’une série de détecteurs disposés à l’extérieur de la cuve du réacteur.

[2Lors d’un Arrêt automatique du réacteur, la chute des grappes dans le cœur du réacteur a pour effet d’introduire instantanément une quantité importante d’absorbant et d’étouffer ainsi la réaction nucléaire.

[3L’arrêt automatique du réacteur est un dispositif de protection du réacteur, prévu dès la conception, qui se déclenche automatiquement en cas d’évènement sortant du cadre du fonctionnement habituel du réacteur.


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Installation(s) concernée(s)

Saint-Laurent

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