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Sortir du nucléaire n°37



Déc - janv 2008

Energie

Une hydroelectricité toujours verte ?

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°37 - Déc - janv 2008

 Energies renouvelables  Politique énergétique
Article publié le : 1er janvier 2008


Les changements climatiques, mais aussi la crise de l’énergie obligent nos sociétés à revoir les systèmes de production et d’usage de l’énergie. L’hydroélectricité est souvent présentée comme une piste prometteuse pour combler une partie des besoins futurs, avec un potentiel de 1000 MW de nouveaux équipements. Or, il est maintenant établi que toute l’hydroélectricité n’est pas sans dommages sur les milieux, y compris la petite hydroélectricité : l’hydroélectricité est renouvelable, les rivières le sont moins.



Pour une hydroélectricité durable

Dans notre pays, la part d’électricité produite par les renouvelables est d’environ 12 %, assurée à 90 % par l’hydraulique, grande et petite, pour une production totale de 70 TWh. Il existe en France entre 2500 et 3000 barrages hydroélectriques, la majorité constituée par des petites centrales hydrauliques d’une puissance inférieure à 1000 kW. EDF exploite environ 450 barrages, dont 220 grands barrages (plus de 15 mètres de hauteur et d’une puissance de 12 MW). La Compagnie Nationale du Rhône (Electrabel / Suez) est le deuxième grand exploitant, avec une vingtaine de grands barrages sur le Rhône. Mais il existe par ailleurs vraisemblablement aux alentours de 50 000 barrages, à finalités diverses, en fonction ou abandonnés, construits dans les fleuves, rivières, torrents, ruisseaux du pays. Sur le seul bassin de la Loire, un inventaire de l’Onema, Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques (ex CSP) fait état d’environ 10 000 obstacles, qui fragmentent les rivières du bassin, générant divers problèmes environnementaux. Un inventaire similaire conduit sur le bassin de la Seine par l’Agence de l’Eau Seine Normandie a inventorié 8000 ouvrages. Il est donc nécessaire, notamment parce que la Directive Cadre sur l’Eau de l’Union Européenne oblige à restaurer les milieux aquatiques, de raisonner à partir de ce haut degré d’artificialisation.
Car, pour amorcer une réflexion cohérente sur le développement durable de l’hydroélectricité, il faut comprendre qu’une rivière est un “organisme vivant”, fragile. Une rivière a tout simplement besoin de couler, naturellement, avec une alternance de hautes et de basses eaux, dans un lit diversifié, juxtaposant des habitats variés. Pour créer ces milieux, elle doit transporter des alluvions : limons, sables, graviers. Les divers barrages, en perturbant le régime d’écoulement des fleuves, en bloquant le transport sédimentaire ont porté des atteintes préoccupantes aux écosystèmes d’eau courante. La rétention des sédiments a entraîné des abaissements de plusieurs mètres sur certaines portions de fleuves, conduisant à l’enfoncement des nappes alluviales, précieuses sources d’alimentation en eau. L’artificialisation du régime des fleuves a, lui, conduit à un appauvrissement de la biodiversité, l’ennoiement de zones d’eau courantes, quelquefois sur des dizaines de kilomètres, modifiant les peuplements dans le sens d’un appauvrissement de la diversité biologique. Les barrages ont aussi entraîné la disparition de certaines ressources piscicoles comme les poissons migrateurs, souvent incapables de les franchir même si la technologie des échelles à poissons a fait de sérieux progrès. Avec les poissons, les ressources en protéines locales, à faible empreinte écologique, s’en vont, et la profession de pêcheur professionnel en rivière est aujourd’hui très menacée. Les barrages aggravent aussi les pollutions, en supprimant le pouvoir auto épurateur des eaux courantes.
Il n’est donc plus possible de considérer que ces ouvrages, même les petits, sont sans conséquence pour l’écologie des fleuves. C’est plutôt le contraire, et il vaut mieux le savoir. Alors, est-ce une technologie dépassée ? Faut-il les enlever ? La question n’a pas vraiment de sens. D’une part parce que les barrages ont une place conséquente dans l’histoire des cultures : les hommes en construisent depuis 5000 ans et l’invention de l’agriculture. Ensuite, ils rendent un certain nombre de services indispensables : alimentation en eau, hydroélectricité, navigation. Tout cela relève du fait. Mais il est temps aussi, autres faits, de voir l’état avancé de dégradation des rivières et fleuves. Dans le monde, sur 177 fleuves supérieurs à 1000 km, seulement 21 sont encore libres, de la source à la mer. On dénombre 3200 grands barrages en Europe et, en France, sur 270 000 km de rivières, à peine 20 % sont considérés comme étant en “bon état écologique”. Les rivières où aller et emmener librement, gratuitement ses enfants pêcher, se délasser, nager, rêver, contempler, se raréfient. Durable ? Non. Alors, il est nécessaire de passer à une approche plus mesurée des barrages et de suivre le mouvement amorcé dans d’autres pays, Suisse, USA, Allemagne pour construire une hydroélectricité durable.

Coopérer autour des indispensables compromis
Il y a certes une différence entre les grands et les petits barrages. Une microcentrale de 3 mètres de hauteur, voire une picocentrale n’a rien à voir avec la retenue de Grand’Maison (Isère) et ses 1800 MW. Pourtant, ce raisonnement doit être complexifié : selon son fonctionnement, sa situation, le nombre d’ouvrages déjà présents sur le cours d’eau, l’impact d’un barrage varie. Si les pires ouvrages sont souvent ceux construits dans les estuaires, des zones extrêmement productives, une série de petits barrages, même équipés de dispositifs de franchissement mais espacés de quelques kilomètres chacun peut avoir le même impact désastreux qu’un seul grand barrage, en transformant le cours d’eau en une suite de retenues d’eau stagnantes. Certains petits barrages détournant, par tuyaux interposés, les rivières sur des kilomètres, rendent quasiment stériles les portions court-circuitées. Le fonctionnement des ouvrages, par éclusées avec un stockage de l’eau turbinée pour les pointes de consommation ou au fil de l’eau joue aussi un rôle déterminant, le second étant moins dommageable. Mais, globalement, l’hydroélectricité sans impacts est un mythe.
Alors ? Que faire ? La première des réponses est d’abord de co-construire une nouvelle “culture de l’eau”, qui intègre sérieusement la fragilité des milieux, dans notre pays globalement très en retard sur les questions écologiques, et qui privilégie ensuite sobriété énergétique, exploitation des formidables gisements de négawatts avant de penser nouveaux barrages. Pour cela, il faut faire naître un climat de partage des connaissances, d’élaboration collective des projets qui permette de croiser les contraintes, les acteurs et donc de faire les bons choix : il ne faut donc pas hésiter, quand les dommages excèdent les bénéfices, comme pour le barrage de Poutès, sur l’Allier, à effacer les ouvrages obsolètes et les remplacer par d’autres énergies renouvelables, biomasse, solaire, éolien, méthanisation. Il est également nécessaire d’aller vers la labellisation de l’électricité, comme le font d’autres pays d’Europe. Le WWF a participé à la création du label EUGENE, European Green Electricity Network, conciliant production et renaturalisation, réduisant la quantité produite, augmentant légèrement le prix du kWh et consacrant une part des sommes recueillies à la restauration des rivières. C’est un compromis, qui permet à l’ensemble du corps social de comprendre que la production d’hydroélectricité a un coût environnemental qu’il faut réduire au maximum. En France, les marges de progrès sont immenses, mais le marché n’existe pas encore, tant nous avons été infantilisés avec un discours simplificateur sur l’hydroélectricité et l’énergie. Il existe quelques fournisseurs : Enercoop, Green Access, Gaz et Electricité de Grenoble qui offrent des conditions de garanties optimales et les ONG, sous l’égide du CLER (Comité de Liaison Energies Renouvelables), ont lancé cet été le label EVE (Electricité Verte), qui est une première tentative française, perfectible.
Enfin, il n’est a priori pas complètement exclu de construire de nouvelles microcentrales. Mais après avoir en priorité turbiné les débits réservés, renouvelé l’équipement des ouvrages existants avec la meilleure technologie disponible, turbines à rotation lente, nouveaux générateurs, et en refusant explicitement de construire de nouveaux ouvrages sur les dernières portions de rivières intactes. Le WWF et ses partenaires (Frapna, Fédération de Pêche de la Loire, LPO) soutiennent ainsi l’équipement d’une microcentrale sur le barrage de navigation de Roanne, dans la Loire, ouvrage qu’il n’est pas question d’effacer. Coopérons : ONG, services de l’Etat, syndicats de producteurs, consommateurs, collectivités, entreprises. En cette période de profonde transformation du regard que nous portons sur l’énergie, nous devons, tous, construire un cadre de pensée neuf, complexe, basé sur la recherche collective de solutions. Nous n’avons pas le choix. Nous devons réduire notre “empreinte écologique” sur les rivières : nous avons besoin d’électricité renouvelable, nous avons aussi besoin de rivières vivantes.
Les débits réservés, qu’est-ce que c’est ?

La plupart des ouvrages établis sur les cours d’eau ont pour but d’en détourner une partie du débit qui est conduit vers des turbines ou sert à l’alimentation d’un canal. Une petite quantité d’eau qu’on appelle le débit réservé est obligatoirement laissée dans le lit initial de la rivière. Pendant longtemps, ce débit réservé a été dérisoire, inapte à la vie de la rivière : pour le grand canal d’Alsace, sur le Rhin, le débit réservé, pour un débit annuel moyen (module) estimé à 1300 m3 par seconde, est de 20 à 30 m3/s, selon la saison, débit lui-même turbiné au barrage de Kembs.
Depuis la loi pêche de 1984, le débit réservé minimum est fixé à 1/10e du module en règle générale, 1/40e pour les plus grands fleuves. Avec la nouvelle loi LEMA (Loi sur l’Eau est les Milieux Aquatiques) du 30 décembre 2006, cette part du 1/10e est confirmée et le 1/40e pour les grands fleuves est ramené à 1/20e , mais avec de nouvelles possibilités de dérogation sur certains cours d’eau dits "cours d’eau atypiques". La LEMA introduit également la possibilité de moduler le débit réservé au cours de l’année sous réserve que sa moyenne annuelle respecte les valeurs rappelées ci-dessus.
En contrepartie d’un accroissement du débit réservé, turbiner ces débits ne pose, à priori, aucun problème majeur pour le milieu. Le barrage existe : il paraît plus important de réclamer une augmentation des débits réservés que de s’opposer à un turbinage d’un débit qui retourne à la rivière. Il semble, selon le rapport Cochet (et d’autres) qu’il y ait 1000 MW exploitables de ce fait. On évite ainsi la construction de nouveaux ouvrages par l’optimisation d’une installation, l’exploitation possible d’un gisement, à faire avec les études correspondantes, dans des conditions de rentabilité économique qui sont à étudier ouvrage par ouvrage.
Martin Arnould

Chargé de programme “Rivières Vivantes”
WWF-France 26 rue Brossard, 42 000 St Etienne
Mail : Marnould@wwf.fr
Tél. 04 77 21 58 24

Pour une hydroélectricité durable

Dans notre pays, la part d’électricité produite par les renouvelables est d’environ 12 %, assurée à 90 % par l’hydraulique, grande et petite, pour une production totale de 70 TWh. Il existe en France entre 2500 et 3000 barrages hydroélectriques, la majorité constituée par des petites centrales hydrauliques d’une puissance inférieure à 1000 kW. EDF exploite environ 450 barrages, dont 220 grands barrages (plus de 15 mètres de hauteur et d’une puissance de 12 MW). La Compagnie Nationale du Rhône (Electrabel / Suez) est le deuxième grand exploitant, avec une vingtaine de grands barrages sur le Rhône. Mais il existe par ailleurs vraisemblablement aux alentours de 50 000 barrages, à finalités diverses, en fonction ou abandonnés, construits dans les fleuves, rivières, torrents, ruisseaux du pays. Sur le seul bassin de la Loire, un inventaire de l’Onema, Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques (ex CSP) fait état d’environ 10 000 obstacles, qui fragmentent les rivières du bassin, générant divers problèmes environnementaux. Un inventaire similaire conduit sur le bassin de la Seine par l’Agence de l’Eau Seine Normandie a inventorié 8000 ouvrages. Il est donc nécessaire, notamment parce que la Directive Cadre sur l’Eau de l’Union Européenne oblige à restaurer les milieux aquatiques, de raisonner à partir de ce haut degré d’artificialisation.
Car, pour amorcer une réflexion cohérente sur le développement durable de l’hydroélectricité, il faut comprendre qu’une rivière est un “organisme vivant”, fragile. Une rivière a tout simplement besoin de couler, naturellement, avec une alternance de hautes et de basses eaux, dans un lit diversifié, juxtaposant des habitats variés. Pour créer ces milieux, elle doit transporter des alluvions : limons, sables, graviers. Les divers barrages, en perturbant le régime d’écoulement des fleuves, en bloquant le transport sédimentaire ont porté des atteintes préoccupantes aux écosystèmes d’eau courante. La rétention des sédiments a entraîné des abaissements de plusieurs mètres sur certaines portions de fleuves, conduisant à l’enfoncement des nappes alluviales, précieuses sources d’alimentation en eau. L’artificialisation du régime des fleuves a, lui, conduit à un appauvrissement de la biodiversité, l’ennoiement de zones d’eau courantes, quelquefois sur des dizaines de kilomètres, modifiant les peuplements dans le sens d’un appauvrissement de la diversité biologique. Les barrages ont aussi entraîné la disparition de certaines ressources piscicoles comme les poissons migrateurs, souvent incapables de les franchir même si la technologie des échelles à poissons a fait de sérieux progrès. Avec les poissons, les ressources en protéines locales, à faible empreinte écologique, s’en vont, et la profession de pêcheur professionnel en rivière est aujourd’hui très menacée. Les barrages aggravent aussi les pollutions, en supprimant le pouvoir auto épurateur des eaux courantes.
Il n’est donc plus possible de considérer que ces ouvrages, même les petits, sont sans conséquence pour l’écologie des fleuves. C’est plutôt le contraire, et il vaut mieux le savoir. Alors, est-ce une technologie dépassée ? Faut-il les enlever ? La question n’a pas vraiment de sens. D’une part parce que les barrages ont une place conséquente dans l’histoire des cultures : les hommes en construisent depuis 5000 ans et l’invention de l’agriculture. Ensuite, ils rendent un certain nombre de services indispensables : alimentation en eau, hydroélectricité, navigation. Tout cela relève du fait. Mais il est temps aussi, autres faits, de voir l’état avancé de dégradation des rivières et fleuves. Dans le monde, sur 177 fleuves supérieurs à 1000 km, seulement 21 sont encore libres, de la source à la mer. On dénombre 3200 grands barrages en Europe et, en France, sur 270 000 km de rivières, à peine 20 % sont considérés comme étant en “bon état écologique”. Les rivières où aller et emmener librement, gratuitement ses enfants pêcher, se délasser, nager, rêver, contempler, se raréfient. Durable ? Non. Alors, il est nécessaire de passer à une approche plus mesurée des barrages et de suivre le mouvement amorcé dans d’autres pays, Suisse, USA, Allemagne pour construire une hydroélectricité durable.

Coopérer autour des indispensables compromis
Il y a certes une différence entre les grands et les petits barrages. Une microcentrale de 3 mètres de hauteur, voire une picocentrale n’a rien à voir avec la retenue de Grand’Maison (Isère) et ses 1800 MW. Pourtant, ce raisonnement doit être complexifié : selon son fonctionnement, sa situation, le nombre d’ouvrages déjà présents sur le cours d’eau, l’impact d’un barrage varie. Si les pires ouvrages sont souvent ceux construits dans les estuaires, des zones extrêmement productives, une série de petits barrages, même équipés de dispositifs de franchissement mais espacés de quelques kilomètres chacun peut avoir le même impact désastreux qu’un seul grand barrage, en transformant le cours d’eau en une suite de retenues d’eau stagnantes. Certains petits barrages détournant, par tuyaux interposés, les rivières sur des kilomètres, rendent quasiment stériles les portions court-circuitées. Le fonctionnement des ouvrages, par éclusées avec un stockage de l’eau turbinée pour les pointes de consommation ou au fil de l’eau joue aussi un rôle déterminant, le second étant moins dommageable. Mais, globalement, l’hydroélectricité sans impacts est un mythe.
Alors ? Que faire ? La première des réponses est d’abord de co-construire une nouvelle “culture de l’eau”, qui intègre sérieusement la fragilité des milieux, dans notre pays globalement très en retard sur les questions écologiques, et qui privilégie ensuite sobriété énergétique, exploitation des formidables gisements de négawatts avant de penser nouveaux barrages. Pour cela, il faut faire naître un climat de partage des connaissances, d’élaboration collective des projets qui permette de croiser les contraintes, les acteurs et donc de faire les bons choix : il ne faut donc pas hésiter, quand les dommages excèdent les bénéfices, comme pour le barrage de Poutès, sur l’Allier, à effacer les ouvrages obsolètes et les remplacer par d’autres énergies renouvelables, biomasse, solaire, éolien, méthanisation. Il est également nécessaire d’aller vers la labellisation de l’électricité, comme le font d’autres pays d’Europe. Le WWF a participé à la création du label EUGENE, European Green Electricity Network, conciliant production et renaturalisation, réduisant la quantité produite, augmentant légèrement le prix du kWh et consacrant une part des sommes recueillies à la restauration des rivières. C’est un compromis, qui permet à l’ensemble du corps social de comprendre que la production d’hydroélectricité a un coût environnemental qu’il faut réduire au maximum. En France, les marges de progrès sont immenses, mais le marché n’existe pas encore, tant nous avons été infantilisés avec un discours simplificateur sur l’hydroélectricité et l’énergie. Il existe quelques fournisseurs : Enercoop, Green Access, Gaz et Electricité de Grenoble qui offrent des conditions de garanties optimales et les ONG, sous l’égide du CLER (Comité de Liaison Energies Renouvelables), ont lancé cet été le label EVE (Electricité Verte), qui est une première tentative française, perfectible.
Enfin, il n’est a priori pas complètement exclu de construire de nouvelles microcentrales. Mais après avoir en priorité turbiné les débits réservés, renouvelé l’équipement des ouvrages existants avec la meilleure technologie disponible, turbines à rotation lente, nouveaux générateurs, et en refusant explicitement de construire de nouveaux ouvrages sur les dernières portions de rivières intactes. Le WWF et ses partenaires (Frapna, Fédération de Pêche de la Loire, LPO) soutiennent ainsi l’équipement d’une microcentrale sur le barrage de navigation de Roanne, dans la Loire, ouvrage qu’il n’est pas question d’effacer. Coopérons : ONG, services de l’Etat, syndicats de producteurs, consommateurs, collectivités, entreprises. En cette période de profonde transformation du regard que nous portons sur l’énergie, nous devons, tous, construire un cadre de pensée neuf, complexe, basé sur la recherche collective de solutions. Nous n’avons pas le choix. Nous devons réduire notre “empreinte écologique” sur les rivières : nous avons besoin d’électricité renouvelable, nous avons aussi besoin de rivières vivantes.
Les débits réservés, qu’est-ce que c’est ?

La plupart des ouvrages établis sur les cours d’eau ont pour but d’en détourner une partie du débit qui est conduit vers des turbines ou sert à l’alimentation d’un canal. Une petite quantité d’eau qu’on appelle le débit réservé est obligatoirement laissée dans le lit initial de la rivière. Pendant longtemps, ce débit réservé a été dérisoire, inapte à la vie de la rivière : pour le grand canal d’Alsace, sur le Rhin, le débit réservé, pour un débit annuel moyen (module) estimé à 1300 m3 par seconde, est de 20 à 30 m3/s, selon la saison, débit lui-même turbiné au barrage de Kembs.
Depuis la loi pêche de 1984, le débit réservé minimum est fixé à 1/10e du module en règle générale, 1/40e pour les plus grands fleuves. Avec la nouvelle loi LEMA (Loi sur l’Eau est les Milieux Aquatiques) du 30 décembre 2006, cette part du 1/10e est confirmée et le 1/40e pour les grands fleuves est ramené à 1/20e , mais avec de nouvelles possibilités de dérogation sur certains cours d’eau dits "cours d’eau atypiques". La LEMA introduit également la possibilité de moduler le débit réservé au cours de l’année sous réserve que sa moyenne annuelle respecte les valeurs rappelées ci-dessus.
En contrepartie d’un accroissement du débit réservé, turbiner ces débits ne pose, à priori, aucun problème majeur pour le milieu. Le barrage existe : il paraît plus important de réclamer une augmentation des débits réservés que de s’opposer à un turbinage d’un débit qui retourne à la rivière. Il semble, selon le rapport Cochet (et d’autres) qu’il y ait 1000 MW exploitables de ce fait. On évite ainsi la construction de nouveaux ouvrages par l’optimisation d’une installation, l’exploitation possible d’un gisement, à faire avec les études correspondantes, dans des conditions de rentabilité économique qui sont à étudier ouvrage par ouvrage.
Martin Arnould

Chargé de programme “Rivières Vivantes”
WWF-France 26 rue Brossard, 42 000 St Etienne
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Tél. 04 77 21 58 24



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