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Sortir du nucléaire n°31



Juin 2006

Témoignage événement

Tchernobyl : un tournant de l’histoire

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°31 - Juin 2006

 Tchernobyl
Article publié le : 1er juin 2006


La catastrophe de Tchernobyl m’a ouvert les yeux comme rien ne l’avait fait jusque là : elle a montré les conséquences dramatiques de l’énergie nucléaire, même celle que l’on utilise à des fins non militaires.



Plus encore que le lancement de ma politique de Perestroika, l’incendie de Tchernobyl il y a tout juste 20 ans a peut-être été la véritable origine de l’effondrement de l’Union Soviétique 5 ans plus tard. La catastrophe de Tchernobyl constitue un tournant de l’histoire : il y a un avant, et un après très différent.

Personne ne connaissait la vérité

Le matin même de l’explosion à la centrale le 26 avril 1986, le Politburo s’est réuni pour discuter de la situation, et a mis en place une commission gouvernementale chargée de gérer les conséquences. Cette commission devait contrôler la situation et assurer la prise de mesures importantes, en particulier concernant la santé des populations de la zone de l’accident. De plus, l’Académie des Sciences a réuni d’éminents scientifiques qui furent immédiatement envoyés dans la région.

Le Politburo n’a pas obtenu tout de suite les informations précises et exactes de la situation directement après l’explosion. Néanmoins, il avait pour instruction générale de divulguer ouvertement les informations lorsqu’il les recevrait, en conformité avec la Glasnost déjà établie à cette période en Union Soviétique.

Ainsi, les critiques accusant le Politburo d’avoir occulté l’information sur la catastrophe sont loin de la réalité. L’une des raisons qui me fait penser qu’il n’y a pas eu de mensonge délibéré est que lors de la visite de 2 jours de la commission gouvernementale sur les lieux en Polésie juste après l’accident, près de Tchernobyl, tous ses membres ont pris leur repas le soir avec les aliments et l’eau habituels, ils se déplaçaient sans masque pour respirer, comme n’importe laquelle des personnes qui travaillaient alors là-bas. Si l’administration locale ou les scientifiques avaient eu conscience de l’impact réel de la catastrophe, ils n’auraient pas pris de tels risques.

En réalité, personne ne connaissait la vérité, c’est pourquoi toutes nos tentatives d’obtenir une information complète sur l’étendue de l’accident restaient sans réponse. Nous avons cru tout d’abord que l’impact principal de l’explosion toucherait l’Ukraine en premier lieu, mais la Biélorussie au nord-ouest fut plus gravement touchée, puis la Pologne et la Suède essuyèrent les retombées.

Evidemment, le monde fut d’abord informé de la catastrophe de Tchernobyl par les scientifiques suédois, et l’idée s’ensuivit que nous dissimulions quelque chose. Mais en réalité, nous n’avions rien à cacher, pour la simple raison que durant une journée et demie nous n’avions pas l’information. Ce n’est que quelques jours plus tard que nous avons appris que ce qui s’était passé ne relevait pas du simple incident mais qu’il s’agissait d’une véritable catastrophe nucléaire – l’explosion du réacteur n°4 de la centrale de Tchernobyl.

Si le premier rapport sur Tchernobyl a été publié dans la Pravda le 28 avril, la situation était loin d’être claire et maîtrisée. Par exemple, lorsque le réacteur a explosé, le feu fut aussitôt aspergé d’eau, ce qui ne fit qu’empirer les choses car les particules nucléaires ont alors commencé à se répandre dans l’atmosphère. Entre-temps, les mesures pour venir en aide aux populations dans la zone de la catastrophe étaient mises en œuvre : celles-ci furent évacuées et quelque 200 organismes médicaux se chargèrent d’effectuer des tests de radioactivité sur les personnes.

Le contenu du réacteur nucléaire risquait de s’infiltrer dans les sols, puis de se déverser dans le Dniepr, mettant gravement en danger la population de Kiev ainsi que des autres villes en bordure du fleuve. Un chantier de protection des berges fut ainsi mis en route, entraînant l’arrêt total de la centrale de Tchernobyl. Les ressources de notre immense pays furent mobilisées afin de limiter les dégâts, avec entre autres la construction du sarcophage qui allait enfermer le 4e réacteur.

Le système ne pouvait perdurer

La catastrophe de Tchernobyl a plus que tout ouvert la voie vers une plus grande liberté d’expression, au point que le système que nous connaissions alors ne pouvait plus perdurer. Cela a mis en évidence de manière très claire l’importance de poursuivre la Glanost, et je dois dire qu’à partir de là, ma référence au temps s’est modifiée, en termes d’avant et d’après-Tchernobyl.

Le prix de la catastrophe de Tchernobyl a été accablant, tant sur le plan humain que sur le plan économique. L’héritage de Tchernobyl affecte aujourd’hui encore l’économie de la Russie, de l’Ukraine et de la Biélorussie. Certains disent même que le prix économique pour l’URSS a été si élevé qu’il a mis un terme à la course aux armements, car je ne pouvais pas continuer à fabriquer des armes tout en payant pour le nettoyage de Tchernobyl.

Ceci est faux. Ma déclaration du 15 janvier 1986 est bien connue du monde entier. J’ai lancé un appel pour réduire l’armement, dont les armes nucléaires, et ai proposé que d’ici l’an 2000, aucun pays ne soit doté d’armes atomiques. Je ressentais personnellement une responsabilité morale concernant l’arrêt de la course aux armements. Mais la catastrophe de Tchernobyl m’a ouvert les yeux comme rien ne l’avait fait jusque là : elle a montré les conséquences dramatiques de l’énergie nucléaire, même celle que l’on utilise à des fins non militaires. Nous pouvons nous représenter bien plus clairement ce qui se passerait si une bombe nucléaire explosait. D’après les experts, une rocket SS-18 renfermerait la puissance de 100 Tchernobyl.

Malheureusement, le problème de l’arme nucléaire est toujours aussi grave à l’heure actuelle. Les pays qui la détiennent – les membres du “club nucléaire” comme on l’appelle- ne sont pas pressés de s’en défaire. Au contraire, ils continuent d’entretenir leur arsenal, tandis que les pays qui ne l’ont pas souhaitent l’avoir, dans l’idée que le monopole du club nucléaire est une menace à la paix mondiale.

Le 20e anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl nous rappelle que nous ne devons pas oublier la terrible leçon donnée à notre planète en 1986. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour renforcer la sécurité des lieux nucléaires. Et nous devons commencer à travailler sérieusement à la production de sources d’énergies alternatives.

Le fait que les dirigeants du monde parlent maintenant de plus en plus de cet impératif laisse entendre que la leçon de Tchernobyl est au final enfin comprise.
Tchernobyl 20 ans après : Sortie du livre du Professeur Youri Bandazhevsky

Le destin hors du commun d’un scientifique qui voulait connaître la vérité sur les conséquences de Tchernobyl.

Scientifique biélorusse de renom, le Professeur Youri Bandazhevsky était destiné à une brillante carrière. L’explosion, en avril 1986, du réacteur numéro 4 de la centrale nucléaire de Tchernobyl, en Ukraine, en a décidé autrement.

Le Belarus est lourdement touché et notamment la région de Gomel, où le Pr. Bandazhevsky obtient l’autorisation de créer un institut de médecine en 1990, pour former les médecins qui font cruellement défaut aux victimes de Tchernobyl.

De 1991 à 1999, Youri Bandazhevsky accumule les observations et les recherches. Il démontre les effets nocifs sur l’organisme de l’ingestion chronique d’aliments contaminés, et dénonce le gaspillage des fonds normalement destinés aux recherches sur les conséquences de Tchernobyl.

C’est beaucoup trop pour les autorités. Il est brutalement arrêté en juillet 1999 et c’est le début de la descente aux enfers.

Le Professeur Bandazhevsky a recouvré la liberté en août 2005 mais il était privé de ses outils de recherche. La Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité (CRIIRAD), association française possédant un laboratoire d’analyse indépendant à Valence, a mis en place avec Youri Bandazhevsky un partenariat scientifique et conçu à sa demande un vaste projet : créer un laboratoire indépendant au Bélarus, le laboratoire CRIIRAD & Bandazhevsky, afin de mettre fin à une situation injuste et de permettre la poursuite de recherches essentielles pour notre radioprotection.

De ses années passées en prison, le Professeur Bandazhevsky sort un livre, traduit en français :

La philosophie de ma vie, Journal de prison, Tchernobyl 20 ans après - Livre de 320 pages

La CRIIRAD distribue ce livre et reversera l’intégralité des bénéfices pour le financement du laboratoire CRIIRAD-Bandazhevsky. Les droits d’auteur seront également entièrement destinés au projet. Vous pouvez vous le procurer auprès du Réseau "Sortir du nucléaire" pour 24 euros (frais de port compris).

Passez votre commande à : Réseau "Sortir du nucléaire", 9, rue Dumenge 69317 Lyon Cedex 04. Chèque à l’ordre de "Sortir du nucléaire".

Vous soutiendrez ainsi directement la cause de Youri Bandazhevsky.
Mikhail Gorbachev

Dernier président de L’URSS, il est président de la Fondation Gorbachev à Moscou et de la Croix Verte Internationale.

Paru dans "Daily Times" (journal Pakistanais) le 17 avril 2006

Traduction : Myriam Battarel

Plus encore que le lancement de ma politique de Perestroika, l’incendie de Tchernobyl il y a tout juste 20 ans a peut-être été la véritable origine de l’effondrement de l’Union Soviétique 5 ans plus tard. La catastrophe de Tchernobyl constitue un tournant de l’histoire : il y a un avant, et un après très différent.

Personne ne connaissait la vérité

Le matin même de l’explosion à la centrale le 26 avril 1986, le Politburo s’est réuni pour discuter de la situation, et a mis en place une commission gouvernementale chargée de gérer les conséquences. Cette commission devait contrôler la situation et assurer la prise de mesures importantes, en particulier concernant la santé des populations de la zone de l’accident. De plus, l’Académie des Sciences a réuni d’éminents scientifiques qui furent immédiatement envoyés dans la région.

Le Politburo n’a pas obtenu tout de suite les informations précises et exactes de la situation directement après l’explosion. Néanmoins, il avait pour instruction générale de divulguer ouvertement les informations lorsqu’il les recevrait, en conformité avec la Glasnost déjà établie à cette période en Union Soviétique.

Ainsi, les critiques accusant le Politburo d’avoir occulté l’information sur la catastrophe sont loin de la réalité. L’une des raisons qui me fait penser qu’il n’y a pas eu de mensonge délibéré est que lors de la visite de 2 jours de la commission gouvernementale sur les lieux en Polésie juste après l’accident, près de Tchernobyl, tous ses membres ont pris leur repas le soir avec les aliments et l’eau habituels, ils se déplaçaient sans masque pour respirer, comme n’importe laquelle des personnes qui travaillaient alors là-bas. Si l’administration locale ou les scientifiques avaient eu conscience de l’impact réel de la catastrophe, ils n’auraient pas pris de tels risques.

En réalité, personne ne connaissait la vérité, c’est pourquoi toutes nos tentatives d’obtenir une information complète sur l’étendue de l’accident restaient sans réponse. Nous avons cru tout d’abord que l’impact principal de l’explosion toucherait l’Ukraine en premier lieu, mais la Biélorussie au nord-ouest fut plus gravement touchée, puis la Pologne et la Suède essuyèrent les retombées.

Evidemment, le monde fut d’abord informé de la catastrophe de Tchernobyl par les scientifiques suédois, et l’idée s’ensuivit que nous dissimulions quelque chose. Mais en réalité, nous n’avions rien à cacher, pour la simple raison que durant une journée et demie nous n’avions pas l’information. Ce n’est que quelques jours plus tard que nous avons appris que ce qui s’était passé ne relevait pas du simple incident mais qu’il s’agissait d’une véritable catastrophe nucléaire – l’explosion du réacteur n°4 de la centrale de Tchernobyl.

Si le premier rapport sur Tchernobyl a été publié dans la Pravda le 28 avril, la situation était loin d’être claire et maîtrisée. Par exemple, lorsque le réacteur a explosé, le feu fut aussitôt aspergé d’eau, ce qui ne fit qu’empirer les choses car les particules nucléaires ont alors commencé à se répandre dans l’atmosphère. Entre-temps, les mesures pour venir en aide aux populations dans la zone de la catastrophe étaient mises en œuvre : celles-ci furent évacuées et quelque 200 organismes médicaux se chargèrent d’effectuer des tests de radioactivité sur les personnes.

Le contenu du réacteur nucléaire risquait de s’infiltrer dans les sols, puis de se déverser dans le Dniepr, mettant gravement en danger la population de Kiev ainsi que des autres villes en bordure du fleuve. Un chantier de protection des berges fut ainsi mis en route, entraînant l’arrêt total de la centrale de Tchernobyl. Les ressources de notre immense pays furent mobilisées afin de limiter les dégâts, avec entre autres la construction du sarcophage qui allait enfermer le 4e réacteur.

Le système ne pouvait perdurer

La catastrophe de Tchernobyl a plus que tout ouvert la voie vers une plus grande liberté d’expression, au point que le système que nous connaissions alors ne pouvait plus perdurer. Cela a mis en évidence de manière très claire l’importance de poursuivre la Glanost, et je dois dire qu’à partir de là, ma référence au temps s’est modifiée, en termes d’avant et d’après-Tchernobyl.

Le prix de la catastrophe de Tchernobyl a été accablant, tant sur le plan humain que sur le plan économique. L’héritage de Tchernobyl affecte aujourd’hui encore l’économie de la Russie, de l’Ukraine et de la Biélorussie. Certains disent même que le prix économique pour l’URSS a été si élevé qu’il a mis un terme à la course aux armements, car je ne pouvais pas continuer à fabriquer des armes tout en payant pour le nettoyage de Tchernobyl.

Ceci est faux. Ma déclaration du 15 janvier 1986 est bien connue du monde entier. J’ai lancé un appel pour réduire l’armement, dont les armes nucléaires, et ai proposé que d’ici l’an 2000, aucun pays ne soit doté d’armes atomiques. Je ressentais personnellement une responsabilité morale concernant l’arrêt de la course aux armements. Mais la catastrophe de Tchernobyl m’a ouvert les yeux comme rien ne l’avait fait jusque là : elle a montré les conséquences dramatiques de l’énergie nucléaire, même celle que l’on utilise à des fins non militaires. Nous pouvons nous représenter bien plus clairement ce qui se passerait si une bombe nucléaire explosait. D’après les experts, une rocket SS-18 renfermerait la puissance de 100 Tchernobyl.

Malheureusement, le problème de l’arme nucléaire est toujours aussi grave à l’heure actuelle. Les pays qui la détiennent – les membres du “club nucléaire” comme on l’appelle- ne sont pas pressés de s’en défaire. Au contraire, ils continuent d’entretenir leur arsenal, tandis que les pays qui ne l’ont pas souhaitent l’avoir, dans l’idée que le monopole du club nucléaire est une menace à la paix mondiale.

Le 20e anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl nous rappelle que nous ne devons pas oublier la terrible leçon donnée à notre planète en 1986. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour renforcer la sécurité des lieux nucléaires. Et nous devons commencer à travailler sérieusement à la production de sources d’énergies alternatives.

Le fait que les dirigeants du monde parlent maintenant de plus en plus de cet impératif laisse entendre que la leçon de Tchernobyl est au final enfin comprise.
Tchernobyl 20 ans après : Sortie du livre du Professeur Youri Bandazhevsky

Le destin hors du commun d’un scientifique qui voulait connaître la vérité sur les conséquences de Tchernobyl.

Scientifique biélorusse de renom, le Professeur Youri Bandazhevsky était destiné à une brillante carrière. L’explosion, en avril 1986, du réacteur numéro 4 de la centrale nucléaire de Tchernobyl, en Ukraine, en a décidé autrement.

Le Belarus est lourdement touché et notamment la région de Gomel, où le Pr. Bandazhevsky obtient l’autorisation de créer un institut de médecine en 1990, pour former les médecins qui font cruellement défaut aux victimes de Tchernobyl.

De 1991 à 1999, Youri Bandazhevsky accumule les observations et les recherches. Il démontre les effets nocifs sur l’organisme de l’ingestion chronique d’aliments contaminés, et dénonce le gaspillage des fonds normalement destinés aux recherches sur les conséquences de Tchernobyl.

C’est beaucoup trop pour les autorités. Il est brutalement arrêté en juillet 1999 et c’est le début de la descente aux enfers.

Le Professeur Bandazhevsky a recouvré la liberté en août 2005 mais il était privé de ses outils de recherche. La Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité (CRIIRAD), association française possédant un laboratoire d’analyse indépendant à Valence, a mis en place avec Youri Bandazhevsky un partenariat scientifique et conçu à sa demande un vaste projet : créer un laboratoire indépendant au Bélarus, le laboratoire CRIIRAD & Bandazhevsky, afin de mettre fin à une situation injuste et de permettre la poursuite de recherches essentielles pour notre radioprotection.

De ses années passées en prison, le Professeur Bandazhevsky sort un livre, traduit en français :

La philosophie de ma vie, Journal de prison, Tchernobyl 20 ans après - Livre de 320 pages

La CRIIRAD distribue ce livre et reversera l’intégralité des bénéfices pour le financement du laboratoire CRIIRAD-Bandazhevsky. Les droits d’auteur seront également entièrement destinés au projet. Vous pouvez vous le procurer auprès du Réseau "Sortir du nucléaire" pour 24 euros (frais de port compris).

Passez votre commande à : Réseau "Sortir du nucléaire", 9, rue Dumenge 69317 Lyon Cedex 04. Chèque à l’ordre de "Sortir du nucléaire".

Vous soutiendrez ainsi directement la cause de Youri Bandazhevsky.
Mikhail Gorbachev

Dernier président de L’URSS, il est président de la Fondation Gorbachev à Moscou et de la Croix Verte Internationale.

Paru dans "Daily Times" (journal Pakistanais) le 17 avril 2006

Traduction : Myriam Battarel



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