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Sortir du nucléaire n°22



Juillet 2003

Transport

Le trafic secret de plutonium en France !

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°22 - Juillet 2003

 Déchets radioactifs  Sites nucléaires
Article publié le : 1er juillet 2003


L’équivalent de centaines de bombes nucléaires sur l’autoroute du soleil



Le plutonium, un déchet proliférant et radiotoxique :

Elément artificiel créé au moment de la fission dans les réacteurs nucléaires, le plutonium est extrêmement radiotoxique. Inventé à son origine pour fabriquer des bombes nucléaires, il est devenu un encombrant matériau dont on ne sait que faire. La plupart des pays ayant développé un programme électronucléaire ont décidé de laisser ce plutonium à l’intérieur des combustibles nucléaires ayant été irradiés dans les centrales, l’intense radioactivité étant la meilleure protection physique contre l’utilisation du plutonium à des fins militaire ou terroristes. La France quant à elle, pour justifier l’extraction de cette matière dans son usine Areva/Cogema de La Hague a d’abord tenté l’aventure désastreuse de la surrégénération (Superphenix) qui fut un échec financier, industriel et politique considérable. Puis, elle tente de développer le marché du Mox (Mixed Oxyde Fuel) en mélangeant du plutonium, de 6 à 7% dans de l’uranium naturel neuf. A cette fin, toute les semaines de deux à trois convois de Pu quittent l’usine de La Hague en direction de l’une des trois unités de fabrication : Marcoule/Melox, Cadarache ou Dessel (Belgique). Dans chacun de ces transports se trouvent 150 kilos de plutonium pur, soit l’équivalent d’une vingtaine de bombes nucléaires. Rappelons qu’avec de six à huit kilos de plutonium, soit la taille d’un pamplemousse, ont peut faire une bombe de type Hiroshima.


Un trafic routinier où la sécurité finit par être oubliée

Alors qu’à ces débuts les quantités transportées étaient faibles et que de simples petits véhicules banalisés pouvaient assurer ces transferts, l’industrialisation du procédé ayant augmenté de manière considérable la quantité de matière à transporter, Cogema Logistics (ex : Transnucléaire) est passé à l‘utilisation de semi-remorques. Greenpeace s’est toujours opposé à l’utilisation du plutonium et à son transport, aussi depuis de nombreuses années, l’organisation a suivi l’évolution de ceux-ci.

C’est avec une facilité déconcertante que simplement en regroupant des documents publics et en observant sur le terrain les méthodes utilisées, Greenpeace a pu identifier, suivre, photographier, comptabiliser l’ensemble des transports depuis l’usine de La Hague. Pendant plus d’un an, à partir de fin janvier 2002, de petits groupes de militants ont ainsi documenté l’ensemble des transports et les lieux d’étapes utilisés par les convois. L’ensemble des informations est disponible sur le site Internet " stop-plutonium.org ", sur lequel les parcours et horaires utilisés sont publiés.

Ainsi ce sont trois camions qui chaque semaine assuraient de deux à trois rotations, utilisant toujours le même parcours, au même horaire suivant une routine éprouvée. Facilement reconnaissable par Greenpeace, ils l’étaient donc de même pour n’importe quelle autre organisation qui pourrait avoir des intentions très différentes de celle de l’association non-violente.

Greenpeace a ainsi démontré que ces transports, dont la sécurité repose sur le secret sont en fait faciles à identifier. De plus l’organisation écologiste à mis en évidence de nombreuses lacunes dans la sûreté des ces convois, par exemple :

- Les containeurs FS47 contenant le plutonium, doivent résister à une chute de 9 mètres de haut : dans les faits Greenpeace a montré qu’ils passent sur de nombreux ponts ou viaducs à des hauteurs nettement supérieures.

- Ces containeurs doivent résister à un incendie de 800 degrés pendant une demi-heure : dans les faits une collision entre un de ces camions et un véhicule de transport de carburant inflammable générerait un incendie qui durerait beaucoup plus longtemps et à des températures nettement supérieures. Alors que dire du passage de ces camions sur le viaduc de Calix à Caen, à plusieurs centaines de mètres de haut et au-dessus de cuves de stockages de fuel.

19 février 2003, les "inspecteurs" de Greenpeace interceptent un convoi de matériel pouvant servir à des armes de destruction massive

Le 19 février, Greenpeace a décidé de passer à l’action en bloquant l’un de ces camions en plein centre ville de Chalon sur Saône, à cent mètres de la caserne dans laquelle, le véhicule devait faire étape pour le repas du midi.

Ce lieu a été choisi, pour attirer l’attention du public, des médias et des élus sur le fait que ce type de trafic secret peut passer à coté de chez vous et sans le savoir, faisant ainsi prendre des risques considérables aux populations, de plus l’étape en caserne démontre une fois de plus que le lien originel du civil et du militaire n’a jamais été rompu et qu’il ne pourra jamais l’être, le plutonium est bien un matériau proliférant.

Scénario : Parti la veille à 13 heures précises de l’usine Cogema de La Hague, ayant passé la nuit à Saclay (sud de Paris), comme à son habitude, le convoi quitte la région parisienne à 7 heures. Il est composé comme toujours d’un camion semi-remorque Mercedes et de deux véhicules, avec deux ou trois gendarmes à leur bord. A 11 h 10, le convoi passe à la hauteur de Beaune sur l’autoroute A6, l’observateur de Greenpeace peut confirmer à ses collègues que le convoi est bien à l’heure et que dans dix-sept minutes il passera la barrière de péage de Chalon Nord. Avenue de Paris, les militants des Greenpeace attendent simplement que le convoi ralentisse et s’arrête derrière une des voitures du dispositif de l’organisation qui roulait devant le convoi. A 11h45, en sept secondes, bien avant que les gendarmes de l’escorte n’aient compris ce qui leur arrivait, ou même qu’ils aient ouvert leurs portières, 25 militants bloquent et s’enchaînent sur le camion de plutonium. Les gendarmes sortent alors leurs gilets pare balle et des fusils d’assaut du coffre des voitures, il est trop tard. Les forces de l’ordre mettront un temps incroyable à réagir, ils ne viendront à bout des militants que beaucoup plus tard. Le convoi ne décollera que vers 15 h 30, immobilisé ainsi pendant presque quatre heures.

Les autorités et Areva, prises au dépourvu, n’ont pas de réponse

Face à cette action les autorités et la Cogema ont montré à quel point elles étaient dépourvues de réponses adaptées :

- Areva/Cogema : "Les gendarmes n’ont pas réagi, mais si ça avait été d’autres que Greenpeace, ils auraient réagi autrement."

- Cogema Logistics : "Le problème, c’est qu’il y a un point de départ et un point d’arrivée… alors évidemment ça a été facile pour eux."

- Anne Lauvergeon : "Ce plutonium n’est pas de qualité militaire, il ne pourrait pas servir à faire des bombes"

- M. Lallemand, haut fonctionnaire de défense : "Le système de protection repose sur le "secret militaire", "il faudra que le secret soit mieux conservé, si possible".


Dans les faits qu’ont-ils décidé de changer à ce système ? Rien !

Ils ont simplement tenté de brouiller les pistes en changeant légèrement les horaires, par exemple en ne faisant plus de halte, partant à 6 heures le matin de La Hague pour arriver à 19 heures le soir à Marcoule et en mélangeant quelques cabines et remorques de transport. Ainsi les camions habituellement habilités à transporter le Mox "frais" à partir de Melox vers les centrales nucléaires ont été "intervertis" avec ceux qui transportent le plutonium. Résultat, au bout de quelques jours d’observation Greenpeace est à nouveau en capacité de publier la liste des véhicules. En fait aucune bonne solution ne peut être apportée à ces transports, ou plutôt si, il suffit de les arrêter, ils ne servent à rien, coûtent cher et font courir d’énormes risques à des centaines de milliers de personnes.


Et maintenant ? Ce trafic doit stopper immédiatement

Bien entendu Greenpeace n’en restera pas là, depuis les événements de février, les démarches se sont multipliées et très prochainement l’organisation annoncera un plan pour continuer cette campagne contre l’industrie du plutonium. Ainsi vous serez invités, en temps que citoyen, à participer aux investigations, aux contrôles et à la lutte contre la prolifération de ces matériaux fissiles.

Dès maintenant si vous croisez l’un de ces transports sensibles, n’hésitez pas à les montrer du doigt et à contacter Greenpeace pour donner les éléments nécessaires à la continuité de ce travail de suivi des convois.

La lutte contre le plutonium est l’affaire de tous !
Stop-plutonium.org : un site spécialisé sur le plutonium !

Un site web spécialisé a été créé, sous l’adresse : stop.plutonium.org

Vous pouvez y trouver tous les éléments liés à l’industrie du Mox, des cartes, des photos et des explications fournies pour mieux comprendre l’enjeu de ces transports.

Greenpeace a demandé à Wise (World Information Service on Energy), cabinet d’étude indépendant de faire une étude sur l’ensemble des transports générés par l’industrie du plutonium. Cette étude est disponible sur le site web stop-plutonium.org et peut être obtenue sur demande au siège de Greenpeace France.
Yannick Rousselet

Greenpeace

Le plutonium, un déchet proliférant et radiotoxique :

Elément artificiel créé au moment de la fission dans les réacteurs nucléaires, le plutonium est extrêmement radiotoxique. Inventé à son origine pour fabriquer des bombes nucléaires, il est devenu un encombrant matériau dont on ne sait que faire. La plupart des pays ayant développé un programme électronucléaire ont décidé de laisser ce plutonium à l’intérieur des combustibles nucléaires ayant été irradiés dans les centrales, l’intense radioactivité étant la meilleure protection physique contre l’utilisation du plutonium à des fins militaire ou terroristes. La France quant à elle, pour justifier l’extraction de cette matière dans son usine Areva/Cogema de La Hague a d’abord tenté l’aventure désastreuse de la surrégénération (Superphenix) qui fut un échec financier, industriel et politique considérable. Puis, elle tente de développer le marché du Mox (Mixed Oxyde Fuel) en mélangeant du plutonium, de 6 à 7% dans de l’uranium naturel neuf. A cette fin, toute les semaines de deux à trois convois de Pu quittent l’usine de La Hague en direction de l’une des trois unités de fabrication : Marcoule/Melox, Cadarache ou Dessel (Belgique). Dans chacun de ces transports se trouvent 150 kilos de plutonium pur, soit l’équivalent d’une vingtaine de bombes nucléaires. Rappelons qu’avec de six à huit kilos de plutonium, soit la taille d’un pamplemousse, ont peut faire une bombe de type Hiroshima.


Un trafic routinier où la sécurité finit par être oubliée

Alors qu’à ces débuts les quantités transportées étaient faibles et que de simples petits véhicules banalisés pouvaient assurer ces transferts, l’industrialisation du procédé ayant augmenté de manière considérable la quantité de matière à transporter, Cogema Logistics (ex : Transnucléaire) est passé à l‘utilisation de semi-remorques. Greenpeace s’est toujours opposé à l’utilisation du plutonium et à son transport, aussi depuis de nombreuses années, l’organisation a suivi l’évolution de ceux-ci.

C’est avec une facilité déconcertante que simplement en regroupant des documents publics et en observant sur le terrain les méthodes utilisées, Greenpeace a pu identifier, suivre, photographier, comptabiliser l’ensemble des transports depuis l’usine de La Hague. Pendant plus d’un an, à partir de fin janvier 2002, de petits groupes de militants ont ainsi documenté l’ensemble des transports et les lieux d’étapes utilisés par les convois. L’ensemble des informations est disponible sur le site Internet " stop-plutonium.org ", sur lequel les parcours et horaires utilisés sont publiés.

Ainsi ce sont trois camions qui chaque semaine assuraient de deux à trois rotations, utilisant toujours le même parcours, au même horaire suivant une routine éprouvée. Facilement reconnaissable par Greenpeace, ils l’étaient donc de même pour n’importe quelle autre organisation qui pourrait avoir des intentions très différentes de celle de l’association non-violente.

Greenpeace a ainsi démontré que ces transports, dont la sécurité repose sur le secret sont en fait faciles à identifier. De plus l’organisation écologiste à mis en évidence de nombreuses lacunes dans la sûreté des ces convois, par exemple :

- Les containeurs FS47 contenant le plutonium, doivent résister à une chute de 9 mètres de haut : dans les faits Greenpeace a montré qu’ils passent sur de nombreux ponts ou viaducs à des hauteurs nettement supérieures.

- Ces containeurs doivent résister à un incendie de 800 degrés pendant une demi-heure : dans les faits une collision entre un de ces camions et un véhicule de transport de carburant inflammable générerait un incendie qui durerait beaucoup plus longtemps et à des températures nettement supérieures. Alors que dire du passage de ces camions sur le viaduc de Calix à Caen, à plusieurs centaines de mètres de haut et au-dessus de cuves de stockages de fuel.

19 février 2003, les "inspecteurs" de Greenpeace interceptent un convoi de matériel pouvant servir à des armes de destruction massive

Le 19 février, Greenpeace a décidé de passer à l’action en bloquant l’un de ces camions en plein centre ville de Chalon sur Saône, à cent mètres de la caserne dans laquelle, le véhicule devait faire étape pour le repas du midi.

Ce lieu a été choisi, pour attirer l’attention du public, des médias et des élus sur le fait que ce type de trafic secret peut passer à coté de chez vous et sans le savoir, faisant ainsi prendre des risques considérables aux populations, de plus l’étape en caserne démontre une fois de plus que le lien originel du civil et du militaire n’a jamais été rompu et qu’il ne pourra jamais l’être, le plutonium est bien un matériau proliférant.

Scénario : Parti la veille à 13 heures précises de l’usine Cogema de La Hague, ayant passé la nuit à Saclay (sud de Paris), comme à son habitude, le convoi quitte la région parisienne à 7 heures. Il est composé comme toujours d’un camion semi-remorque Mercedes et de deux véhicules, avec deux ou trois gendarmes à leur bord. A 11 h 10, le convoi passe à la hauteur de Beaune sur l’autoroute A6, l’observateur de Greenpeace peut confirmer à ses collègues que le convoi est bien à l’heure et que dans dix-sept minutes il passera la barrière de péage de Chalon Nord. Avenue de Paris, les militants des Greenpeace attendent simplement que le convoi ralentisse et s’arrête derrière une des voitures du dispositif de l’organisation qui roulait devant le convoi. A 11h45, en sept secondes, bien avant que les gendarmes de l’escorte n’aient compris ce qui leur arrivait, ou même qu’ils aient ouvert leurs portières, 25 militants bloquent et s’enchaînent sur le camion de plutonium. Les gendarmes sortent alors leurs gilets pare balle et des fusils d’assaut du coffre des voitures, il est trop tard. Les forces de l’ordre mettront un temps incroyable à réagir, ils ne viendront à bout des militants que beaucoup plus tard. Le convoi ne décollera que vers 15 h 30, immobilisé ainsi pendant presque quatre heures.

Les autorités et Areva, prises au dépourvu, n’ont pas de réponse

Face à cette action les autorités et la Cogema ont montré à quel point elles étaient dépourvues de réponses adaptées :

- Areva/Cogema : "Les gendarmes n’ont pas réagi, mais si ça avait été d’autres que Greenpeace, ils auraient réagi autrement."

- Cogema Logistics : "Le problème, c’est qu’il y a un point de départ et un point d’arrivée… alors évidemment ça a été facile pour eux."

- Anne Lauvergeon : "Ce plutonium n’est pas de qualité militaire, il ne pourrait pas servir à faire des bombes"

- M. Lallemand, haut fonctionnaire de défense : "Le système de protection repose sur le "secret militaire", "il faudra que le secret soit mieux conservé, si possible".


Dans les faits qu’ont-ils décidé de changer à ce système ? Rien !

Ils ont simplement tenté de brouiller les pistes en changeant légèrement les horaires, par exemple en ne faisant plus de halte, partant à 6 heures le matin de La Hague pour arriver à 19 heures le soir à Marcoule et en mélangeant quelques cabines et remorques de transport. Ainsi les camions habituellement habilités à transporter le Mox "frais" à partir de Melox vers les centrales nucléaires ont été "intervertis" avec ceux qui transportent le plutonium. Résultat, au bout de quelques jours d’observation Greenpeace est à nouveau en capacité de publier la liste des véhicules. En fait aucune bonne solution ne peut être apportée à ces transports, ou plutôt si, il suffit de les arrêter, ils ne servent à rien, coûtent cher et font courir d’énormes risques à des centaines de milliers de personnes.


Et maintenant ? Ce trafic doit stopper immédiatement

Bien entendu Greenpeace n’en restera pas là, depuis les événements de février, les démarches se sont multipliées et très prochainement l’organisation annoncera un plan pour continuer cette campagne contre l’industrie du plutonium. Ainsi vous serez invités, en temps que citoyen, à participer aux investigations, aux contrôles et à la lutte contre la prolifération de ces matériaux fissiles.

Dès maintenant si vous croisez l’un de ces transports sensibles, n’hésitez pas à les montrer du doigt et à contacter Greenpeace pour donner les éléments nécessaires à la continuité de ce travail de suivi des convois.

La lutte contre le plutonium est l’affaire de tous !
Stop-plutonium.org : un site spécialisé sur le plutonium !

Un site web spécialisé a été créé, sous l’adresse : stop.plutonium.org

Vous pouvez y trouver tous les éléments liés à l’industrie du Mox, des cartes, des photos et des explications fournies pour mieux comprendre l’enjeu de ces transports.

Greenpeace a demandé à Wise (World Information Service on Energy), cabinet d’étude indépendant de faire une étude sur l’ensemble des transports générés par l’industrie du plutonium. Cette étude est disponible sur le site web stop-plutonium.org et peut être obtenue sur demande au siège de Greenpeace France.
Yannick Rousselet

Greenpeace



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