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Sortir du nucléaire n°23



Décembre 2003

Politique

Le consensus nucléaire allemand : une garantie pour continuer l’exploitation des centrales nucléaires !

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°23 - Décembre 2003

 Sortie du nucléaire
Article publié le : 1er décembre 2003


Beaucoup de résistants contre le nucléaire pensent que les Allemands devraient être satisfaits qu’une sortie du nucléaire, même lente, ait été décidée par le gouvernement fédéral.

Ce consensus nucléaire entre la coalition rouge-verte et le lobby nucléaire allemand est vu comme un succès. Malheureusement, je dois vous décevoir : ce consensus est “un accord sur la continuation de l’exploitation des centrales nucléaires et leur gestion de déchets radioactifs” (d’après M. Goll, président de la direction d’EnBW).

Selon cet accord, les centrales nucléaires continueront de fonctionner pendant 32 ans. De plus, le gouvernement garantit une gestion de déchets radioactifs adaptée à l’exploitation des centrales. Ainsi, la quantité des déchets sera doublée, et le risque d’accident persiste.

Généralement, une centrale nucléaire est exploitée pendant 25 ans. La centrale la plus ancienne d’Allemagne, celle d’EnBW (34% EDF) à Obrigheim, en fonction depuis 31 ans, sera exploitée pendant deux années supplémentaires, afin d’assurer plus de profit à EnBW.

Les résistants allemands continuent la lutte et demandent une sortie réelle et immédiate du nucléaire.

Que signifie le “consensus nucléaire” ?


- Douze nouveaux centres de stockage intermédiaire de déchets radioactifs seront construits à proximité des centrales pour réduire les transports.

- Le futur centre de stockage définitif de déchets radioactifs à Gorleben va posséder une usine de conditionnement des fûts de déchets provenant de tous les autres centres de stockage intermédiaire. Ces fûts ayant des fuites dangereuses, seront transportés à travers le pays vers l’usine de conditionnement. Malgré un moratoire officiel, des déchets radioactifs continueront à arriver à Gorleben.

- Le premier centre de stockage définitif pour déchets faiblement et moyennement radioactifs a été établi dans la mine de Konrad. Or cet endroit présente, comme d’autres, des défauts de sécurité. Par exemple, à Morsleben la mine s’est écroulée partiellement, et à Asse la mine a été inondée.

- L’usine d’enrichissement d’uranium à Gronau sera aggrandie. A l’avenir, de Gronau à Lingen, des combustibles nucléaires seront produits de façon plus massive.

- Il n’y a pas de taxe sur les combustibles nucléaires, ni sur les finances retenues pour des investissements ultérieurs concernant le stockage définitif des déchets. Pendant ce temps, l’industrie nucléaire investit dans des domaines plus profitables.

- Les centrales nucléaires ne sont pas obligées d’avoir une assurance de responsabilité civile.

- En dépit des promesses, les transports dangereux de déchets radioactifs vers les usines de La Hague (France) et de Sellafield (Grande-Bretagne) vont se poursuivre jusqu’en 2005, polluant ces régions pendant des dizaines d’années en produisant du plutonium utilisable pour des armes nucléaires.

- Les normes de sécurité pour les transports ne sont pas respectées : dépassement des seuils, absence totale de tests de chute pour les fûts et manque d’amortisseurs.

- La protection a été été affaiblie par un abaissement au niveau européen des normes de sécurité et des seuils de radioactivité.

- Le consensus accepte la violation de la liberté d’opinion et des droits fondamentaux. Les arrêts de manifestants pendant le passage des trains, les interdictions de rassemblements le long des trajets et les interventions violentes de la police deviennent plus fréquents.

- Une nouvelle génération de réacteurs nucléaires, l’EPR, sera construite en coopération franco-allemande. Cet EPR est conçu en partie par Siemens qui compte l’exporter dans le tiers-Monde.

- Le budget du traité EURATOM provient pour 25% du gouvernement fédéral d’Allemagne. La Commission européenne va continuer de subventionner le lobby du nucléaire sous forme de crédits et de cadeaux de milliards d’euros. L’industrie nucléaire investit cet argent en Europe de l’Est. Néanmoins, le traité EURATOM devrait être annulé, et un traité pour l’exploitation des sources d’énergie renouvelable, EURENEW, devrait être élaboré.

- Le risque d’un accident nucléaire persiste, ce qui montre que le consensus nucléaire est un compromis trompeur et n’est pas un modèle pour d’autres pays.

- Beaucoup d’éoliennes et de capteurs solaires ont certes été installés grâce aux aides gouvernementales. Toutefois, le couplage force-chaleur n’est toujours pas assez soutenu. Pourtant, un réel changement dans l’utilisation d’énergie n’inclut pas seulement l’économie d’énergie et l’exploitation des sources d’énergie renouvelable, mais aussi une meilleure efficacité et une décentralisation de la production d’électricité, ainsi qu’une aide adéquate au couplage force-chaleur. Par ailleurs, plus d’énergies renouvelables diminuent la dépendance au pétrole.

La radioactivité et l’avidité ne connaissent pas de limites, aussi notre résistance contre l’industrie nucléaire ne connaît pas de frontières. Nous souhaitons un monde où toute personne puisse vivre libre, sans soumission et sans violence. Mais avec l’industrie nucléaire, cela n’est possible pour personne, ni pour les autochtones dans les régions d’extraction d’uranium, ni pour ceux qui vivent à proximité des centrales nucléaires, ni pour les peuples qui sont touchés par des armes nucléaires.
Le dessous des cartes du consensus nucléaire allemand du 15 juin 2000

L’échéance des futures centrales nucléaires n’est pas fixée en années mais en quantité d’électricité, soit un total équivalent 2 623,3 teraWh c’est-à-dire 32 années si les centrales produisaient sans interruption. Or, on ne peut compter en moyenne que 78% de production pour des raisons de maintenance, de remplacement de combustibles et de cas d’alerte fréquents. L’échéance dépassera donc indéniablement 35 années. Un réacteur peut-il rester dans le réseau malgré des défauts de sécurité ? Si la décision de fermeture est prise, le délai d’échéance sera transféré vers d’autres centrales. La fermeture des centrales non rentables permettra ainsi la prolongation de l’exploitation d’autres centrales plus récentes. La centrale de Mühlheim-Kärlich, construite illégalement sur un site sismique, est en arrêt depuis plus de 12 ans. Les 107 teraWh théoriquement contenus dans la centrale ont été pris en compte dans l’application du consensus.

Un autre accord gouvernemental ne renforce pas les 2000 niveaux de sécurité actuels et leurs principes de base, refusant de prendre en compte les nouvelles données scientifiques concernant les anciennes centrales Et à l’avenir, les contrôles de sécurité n’auront pas lieu tous les ans, comme le stipule le traité de coalition, mais tous les dix ans, les industriels étant contraints d’accepter ces conditions de contrôle.

Le gouvernement a en outre convenu d’une taxation différente sur les combustibles nucléaires, afin de ne pas sanctionner l’énergie nucléaire par des mesures unilatérales. Et cet accord n’inclut aucune assurance de responsabilité civile.

Les transports prévus jusque 2005 vers les usines de plutonium sont considérés comme partie intégrante de la gestion des déchets. La durée de retraitement étant évaluée à d’environ 15 ans, cette supercherie va donc continuer jusqu’en 2020. Une étude mandatée par le ministère de l’environnement, mais publiée après la décision du consensus, a prouvé que les usines de La Hague et de Sellafield ne répondaient pas aux normes réglementaires allemandes, en raison d’une forte contamination radioactive.

Un moratoire de trois à dix ans a été décidé pour le centre de stockage définitif dans la mine de sel de Gorleben, ce qui ne signifie pas pour autant l’abandon de ce site pour le stockage définitif.

Parallèlement, le gouvernement fédéral abandonne sa conviction que les couches de sel sont inappropriées d’un point de vue géologique, et autorise le conditionnement des fûts.

Otto Mejewski, président du forum sur le nucléaire et dirigeant les usines de Bavière, a commenté ainsi le consensus : “Nous avons atteint notre objectif déclaré de pouvoir poursuivre l’exploitation des centrales nucléaires allemandes à des conditions économiquement rentables. Le gouvernement rouge-vert aurait été tout à fait en position de porter préjudice a posteriori à l’état des centrales nucléaires ainsi qu’à leur fonctionnement.”

Lorsque Stoiber, candidat conservateur à la chancellerie, a annoncé en septembre 2002 durant la campagne des élections législatives qu’il reviendrait sur le consensus nucléaire, il a été hué par les tenants de l’économie nucléaire qui, vraisemblablement, tiennent au maintien du consensus nucléaire, même sous un gouvernement CDU.
Markus Pflueger

c/o Initiative für Atomausstieg Trier, Pfützenstrasse 1, 54290 Trier, Allemagne, mail@markus-pflueger.de

Beaucoup de résistants contre le nucléaire pensent que les Allemands devraient être satisfaits qu’une sortie du nucléaire, même lente, ait été décidée par le gouvernement fédéral.

Ce consensus nucléaire entre la coalition rouge-verte et le lobby nucléaire allemand est vu comme un succès. Malheureusement, je dois vous décevoir : ce consensus est “un accord sur la continuation de l’exploitation des centrales nucléaires et leur gestion de déchets radioactifs” (d’après M. Goll, président de la direction d’EnBW).

Selon cet accord, les centrales nucléaires continueront de fonctionner pendant 32 ans. De plus, le gouvernement garantit une gestion de déchets radioactifs adaptée à l’exploitation des centrales. Ainsi, la quantité des déchets sera doublée, et le risque d’accident persiste.

Généralement, une centrale nucléaire est exploitée pendant 25 ans. La centrale la plus ancienne d’Allemagne, celle d’EnBW (34% EDF) à Obrigheim, en fonction depuis 31 ans, sera exploitée pendant deux années supplémentaires, afin d’assurer plus de profit à EnBW.

Les résistants allemands continuent la lutte et demandent une sortie réelle et immédiate du nucléaire.

Que signifie le “consensus nucléaire” ?


- Douze nouveaux centres de stockage intermédiaire de déchets radioactifs seront construits à proximité des centrales pour réduire les transports.

- Le futur centre de stockage définitif de déchets radioactifs à Gorleben va posséder une usine de conditionnement des fûts de déchets provenant de tous les autres centres de stockage intermédiaire. Ces fûts ayant des fuites dangereuses, seront transportés à travers le pays vers l’usine de conditionnement. Malgré un moratoire officiel, des déchets radioactifs continueront à arriver à Gorleben.

- Le premier centre de stockage définitif pour déchets faiblement et moyennement radioactifs a été établi dans la mine de Konrad. Or cet endroit présente, comme d’autres, des défauts de sécurité. Par exemple, à Morsleben la mine s’est écroulée partiellement, et à Asse la mine a été inondée.

- L’usine d’enrichissement d’uranium à Gronau sera aggrandie. A l’avenir, de Gronau à Lingen, des combustibles nucléaires seront produits de façon plus massive.

- Il n’y a pas de taxe sur les combustibles nucléaires, ni sur les finances retenues pour des investissements ultérieurs concernant le stockage définitif des déchets. Pendant ce temps, l’industrie nucléaire investit dans des domaines plus profitables.

- Les centrales nucléaires ne sont pas obligées d’avoir une assurance de responsabilité civile.

- En dépit des promesses, les transports dangereux de déchets radioactifs vers les usines de La Hague (France) et de Sellafield (Grande-Bretagne) vont se poursuivre jusqu’en 2005, polluant ces régions pendant des dizaines d’années en produisant du plutonium utilisable pour des armes nucléaires.

- Les normes de sécurité pour les transports ne sont pas respectées : dépassement des seuils, absence totale de tests de chute pour les fûts et manque d’amortisseurs.

- La protection a été été affaiblie par un abaissement au niveau européen des normes de sécurité et des seuils de radioactivité.

- Le consensus accepte la violation de la liberté d’opinion et des droits fondamentaux. Les arrêts de manifestants pendant le passage des trains, les interdictions de rassemblements le long des trajets et les interventions violentes de la police deviennent plus fréquents.

- Une nouvelle génération de réacteurs nucléaires, l’EPR, sera construite en coopération franco-allemande. Cet EPR est conçu en partie par Siemens qui compte l’exporter dans le tiers-Monde.

- Le budget du traité EURATOM provient pour 25% du gouvernement fédéral d’Allemagne. La Commission européenne va continuer de subventionner le lobby du nucléaire sous forme de crédits et de cadeaux de milliards d’euros. L’industrie nucléaire investit cet argent en Europe de l’Est. Néanmoins, le traité EURATOM devrait être annulé, et un traité pour l’exploitation des sources d’énergie renouvelable, EURENEW, devrait être élaboré.

- Le risque d’un accident nucléaire persiste, ce qui montre que le consensus nucléaire est un compromis trompeur et n’est pas un modèle pour d’autres pays.

- Beaucoup d’éoliennes et de capteurs solaires ont certes été installés grâce aux aides gouvernementales. Toutefois, le couplage force-chaleur n’est toujours pas assez soutenu. Pourtant, un réel changement dans l’utilisation d’énergie n’inclut pas seulement l’économie d’énergie et l’exploitation des sources d’énergie renouvelable, mais aussi une meilleure efficacité et une décentralisation de la production d’électricité, ainsi qu’une aide adéquate au couplage force-chaleur. Par ailleurs, plus d’énergies renouvelables diminuent la dépendance au pétrole.

La radioactivité et l’avidité ne connaissent pas de limites, aussi notre résistance contre l’industrie nucléaire ne connaît pas de frontières. Nous souhaitons un monde où toute personne puisse vivre libre, sans soumission et sans violence. Mais avec l’industrie nucléaire, cela n’est possible pour personne, ni pour les autochtones dans les régions d’extraction d’uranium, ni pour ceux qui vivent à proximité des centrales nucléaires, ni pour les peuples qui sont touchés par des armes nucléaires.
Le dessous des cartes du consensus nucléaire allemand du 15 juin 2000

L’échéance des futures centrales nucléaires n’est pas fixée en années mais en quantité d’électricité, soit un total équivalent 2 623,3 teraWh c’est-à-dire 32 années si les centrales produisaient sans interruption. Or, on ne peut compter en moyenne que 78% de production pour des raisons de maintenance, de remplacement de combustibles et de cas d’alerte fréquents. L’échéance dépassera donc indéniablement 35 années. Un réacteur peut-il rester dans le réseau malgré des défauts de sécurité ? Si la décision de fermeture est prise, le délai d’échéance sera transféré vers d’autres centrales. La fermeture des centrales non rentables permettra ainsi la prolongation de l’exploitation d’autres centrales plus récentes. La centrale de Mühlheim-Kärlich, construite illégalement sur un site sismique, est en arrêt depuis plus de 12 ans. Les 107 teraWh théoriquement contenus dans la centrale ont été pris en compte dans l’application du consensus.

Un autre accord gouvernemental ne renforce pas les 2000 niveaux de sécurité actuels et leurs principes de base, refusant de prendre en compte les nouvelles données scientifiques concernant les anciennes centrales Et à l’avenir, les contrôles de sécurité n’auront pas lieu tous les ans, comme le stipule le traité de coalition, mais tous les dix ans, les industriels étant contraints d’accepter ces conditions de contrôle.

Le gouvernement a en outre convenu d’une taxation différente sur les combustibles nucléaires, afin de ne pas sanctionner l’énergie nucléaire par des mesures unilatérales. Et cet accord n’inclut aucune assurance de responsabilité civile.

Les transports prévus jusque 2005 vers les usines de plutonium sont considérés comme partie intégrante de la gestion des déchets. La durée de retraitement étant évaluée à d’environ 15 ans, cette supercherie va donc continuer jusqu’en 2020. Une étude mandatée par le ministère de l’environnement, mais publiée après la décision du consensus, a prouvé que les usines de La Hague et de Sellafield ne répondaient pas aux normes réglementaires allemandes, en raison d’une forte contamination radioactive.

Un moratoire de trois à dix ans a été décidé pour le centre de stockage définitif dans la mine de sel de Gorleben, ce qui ne signifie pas pour autant l’abandon de ce site pour le stockage définitif.

Parallèlement, le gouvernement fédéral abandonne sa conviction que les couches de sel sont inappropriées d’un point de vue géologique, et autorise le conditionnement des fûts.

Otto Mejewski, président du forum sur le nucléaire et dirigeant les usines de Bavière, a commenté ainsi le consensus : “Nous avons atteint notre objectif déclaré de pouvoir poursuivre l’exploitation des centrales nucléaires allemandes à des conditions économiquement rentables. Le gouvernement rouge-vert aurait été tout à fait en position de porter préjudice a posteriori à l’état des centrales nucléaires ainsi qu’à leur fonctionnement.”

Lorsque Stoiber, candidat conservateur à la chancellerie, a annoncé en septembre 2002 durant la campagne des élections législatives qu’il reviendrait sur le consensus nucléaire, il a été hué par les tenants de l’économie nucléaire qui, vraisemblablement, tiennent au maintien du consensus nucléaire, même sous un gouvernement CDU.
Markus Pflueger

c/o Initiative für Atomausstieg Trier, Pfützenstrasse 1, 54290 Trier, Allemagne, mail@markus-pflueger.de



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