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Sortir du nucléaire n°61



Mai 2014

Nucléaire militaire

Et si une bombe nucléaire explosait sur Lyon ?

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°61 - Mai 2014

 Risque nucléaire


200 000, 300 000 morts dans l’immédiat. Autant de blessés graves, si ce n’est plus. Tout est quasi détruit dans un diamètre de 10 kilomètres environ. Les conséquences de l’explosion d’une bombe nucléaire de 150 kilotonnes sur une ville comme Lyon seraient incommensurables. Et pourtant le risque existe.



Il ne s’agit pas d’un scénario de science-fiction, mais le résultat d’une étude rédigée par Dominique Lalanne [1] et diffusée lors de la "Seconde conférence internationale sur l’impact humanitaire des armes nucléaires" qui a rassemblé, les 13 et 14 février 2014, 146 États à Nayarit (Mexique).

Le risque d’une guerre nucléaire n’est sans doute pas pour demain matin… Ne dit-on pas qu’il s’agit d’une arme de dissuasion ? Reste que des scénarios d’utilisation — y compris des "frappes d’avertissement" — sont bel et bien mis en place par "nos" dirigeants en cas d’atteinte aux "intérêts vitaux".

Depuis la fin de la guerre froide, le ciblage des populations (stratégie anti-cité) a fait place au ciblage des centres de décision politico-militaire (stratégie anti-force). La base aérienne de Lyon-Mont-Verdun — située à une dizaine de kilomètres du centre-ville — constitue, par exemple, une cible de premier choix : elle accueille en effet le centre de commandement des forces nucléaires en second et un centre de commandement aérien de l’OTAN, plus divers centres de planification et de formation militaires qui en font un véritable centre névralgique pour l’armée…

De plus, le risque d’accident n’est pas à exclure. Comme, par exemple, un Rafale en exercice emportant une bombe nucléaire et qui s’écrase au sol… L’opacité la plus totale règne en France sur ce sujet. Or, le journaliste Eric Schlosser a publié récemment aux États-Unis "Command and Control", dans lequel il révèle une liste de quelque 700 incidents et accidents significatifs impliquant 1250 armes nucléaires pour la seule période de 1950 à 1968 [2]. La France serait-elle la seule puissance nucléaire exempte de tout accident ? Il est permis d’en douter.

Bien sûr, comme tout scénario, celui-ci comporte sa part d’approximation, d’imprévisibilité. Depuis les bombardements de Hiroshima et de Nagasaki les 6 et 9 août 1945 par les États-Unis, les conséquences de l’explosion d’une bombe nucléaire ont été étudiées en détail. Toutefois, l’organisation des villes et les modes de fonctionnement ont considérablement changé depuis lors, venant aggraver encore plus les conditions déjà catastrophiques rencontrées par la population japonaise. Une ville "moderne" comme Lyon est un centre pour le réseau électrique dont la destruction coupera les communications dans toute la région Rhône-Alpes et même au-delà. Les usines chimiques, les stockages de produits pétroliers, la proximité de plusieurs réacteurs nucléaires vont engendrer des catastrophes que l’étude mentionne comme inévitables...

De fait, une frappe nucléaire, même limitée à une seule bombe, créera une situation où les secours seront dans l’incapacité d’apporter l’aide nécessaire pour secourir les blessés, empêcher les accidents en cascade, gérer le traumatisme social et éviter les désordres que cela provoquera inévitablement. Comme le souligne Dominique Lalanne, "seule la prévention, comme en médecine, peut être la réponse adaptée. Seule l’élimination des armes nucléaires est la solution pour éviter de telles catastrophes".

Patrice Bouveret
co-fondateur de l’Observatoire des armements


Notes

[1"Et si une bombe nucléaire explosait sur Lyon ?", rapport bilingue publié par l’Observatoire des armements et ICAN-France (www.icanfrance.org). Disponible en téléchargement sur www.obsarm.org ou contre la somme de 4€ (port compris) auprès de l’Observatoire des armements, 187 montée de Choulans, 69005 Lyon.

[2Cf. "La bombe atomique qui a failli faire sauter New York en 1961" par Claire Arsenault, 21.09.2013, sur le site de RFI ou https://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/070114/les-armes-nucleaires-et-lillusion-de-la-surete

Il ne s’agit pas d’un scénario de science-fiction, mais le résultat d’une étude rédigée par Dominique Lalanne [1] et diffusée lors de la "Seconde conférence internationale sur l’impact humanitaire des armes nucléaires" qui a rassemblé, les 13 et 14 février 2014, 146 États à Nayarit (Mexique).

Le risque d’une guerre nucléaire n’est sans doute pas pour demain matin… Ne dit-on pas qu’il s’agit d’une arme de dissuasion ? Reste que des scénarios d’utilisation — y compris des "frappes d’avertissement" — sont bel et bien mis en place par "nos" dirigeants en cas d’atteinte aux "intérêts vitaux".

Depuis la fin de la guerre froide, le ciblage des populations (stratégie anti-cité) a fait place au ciblage des centres de décision politico-militaire (stratégie anti-force). La base aérienne de Lyon-Mont-Verdun — située à une dizaine de kilomètres du centre-ville — constitue, par exemple, une cible de premier choix : elle accueille en effet le centre de commandement des forces nucléaires en second et un centre de commandement aérien de l’OTAN, plus divers centres de planification et de formation militaires qui en font un véritable centre névralgique pour l’armée…

De plus, le risque d’accident n’est pas à exclure. Comme, par exemple, un Rafale en exercice emportant une bombe nucléaire et qui s’écrase au sol… L’opacité la plus totale règne en France sur ce sujet. Or, le journaliste Eric Schlosser a publié récemment aux États-Unis "Command and Control", dans lequel il révèle une liste de quelque 700 incidents et accidents significatifs impliquant 1250 armes nucléaires pour la seule période de 1950 à 1968 [2]. La France serait-elle la seule puissance nucléaire exempte de tout accident ? Il est permis d’en douter.

Bien sûr, comme tout scénario, celui-ci comporte sa part d’approximation, d’imprévisibilité. Depuis les bombardements de Hiroshima et de Nagasaki les 6 et 9 août 1945 par les États-Unis, les conséquences de l’explosion d’une bombe nucléaire ont été étudiées en détail. Toutefois, l’organisation des villes et les modes de fonctionnement ont considérablement changé depuis lors, venant aggraver encore plus les conditions déjà catastrophiques rencontrées par la population japonaise. Une ville "moderne" comme Lyon est un centre pour le réseau électrique dont la destruction coupera les communications dans toute la région Rhône-Alpes et même au-delà. Les usines chimiques, les stockages de produits pétroliers, la proximité de plusieurs réacteurs nucléaires vont engendrer des catastrophes que l’étude mentionne comme inévitables...

De fait, une frappe nucléaire, même limitée à une seule bombe, créera une situation où les secours seront dans l’incapacité d’apporter l’aide nécessaire pour secourir les blessés, empêcher les accidents en cascade, gérer le traumatisme social et éviter les désordres que cela provoquera inévitablement. Comme le souligne Dominique Lalanne, "seule la prévention, comme en médecine, peut être la réponse adaptée. Seule l’élimination des armes nucléaires est la solution pour éviter de telles catastrophes".

Patrice Bouveret
co-fondateur de l’Observatoire des armements



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