Faire un don

Sortir du nucléaire n°53



Printemps 2012

Fukushima

10-11 mars 2012 : démonstration de force du mouvement antinucléaire !

Article paru dans la revue Sortir du nucléaire n°53 - Printemps 2012



Fukushima : une catastrophe qui ne fait que commencer

Il y a un an, débutait la terrible catastrophe de Fukushima. Un séisme, un tsunami et quatre accidents nucléaires majeurs ont frappé le Japon. Un an a passé, les médias se sont retirés, mais la catastrophe ne fait que commencer. Les réacteurs de la centrale de Fukushima-Daiichi ne sont toujours pas sous contrôle, ils continuent de disperser des radioéléments dans l’environnement, et restent à la merci d’un prochain séisme.

Dans la préfecture de Fukushima, l’"ennemi invisible" de la radioactivité est à l’œuvre ; pernicieux, silencieux, inodore, incolore... Et les conséquences vont rapidement se faire sentir. Des gravats radioactifs sont disséminés partout. Le sol, l’eau, les aliments, sont contaminés. On autorise à nouveau la vente de riz pollué par le césium-137 et les mesures prises pour protéger les enfants sont dérisoires.

Partout c’est l’électrochoc, sauf en France...

Dans le monde entier, la catastrophe de Fukushima a provoqué un électrochoc. Et très vite, plusieurs pays européens ont réagi : la Suisse a décidé de sortir du nucléaire ; l’Allemagne et la Belgique ont accéléré leur plan de sortie et l’Italie a confirmé par référendum qu’elle ne recourrait plus à cette énergie. À l’international, de nombreux projets de réacteurs ont été reportés ou annulés et les commandes d’Areva sont en berne.

Mais les responsables politiques français, eux, persistent et signent : il n’est pas question de toucher au fleuron de l’industrie française. Dans les jours qui ont suivi la catastrophe et tout au long de cette année, le lobby et le gouvernement ont multiplié les déclarations lénifiantes et mensonges éhontés sur la prétendue sûreté de nos centrales.

Réagir pour ne plus subir...

Face à ce déni et devant la surdité des responsables politiques, des habitants de la vallée du Rhône ont décidé de réagir. Réagir, pour ne plus subir. Pour la plupart, ils n’étaient pas des militants antinucléaires, mais ils vivent aux pieds des centrales et la catastrophe de Fukushima les a interpellés, elle les a profondément marqués. Ils se sont alors lancés dans un pari que tout le monde estimait fou : mobiliser tout autour d’eux tous ceux qui souhaitent un avenir sans nucléaire pour former une chaîne humaine sur 235 km, entre Lyon et Avignon, dans la région la plus nucléarisée d’Europe. Pour mener de front ce projet, ils se sont regroupés autour d’un collectif, la RECH : "réaction en chaîne humaine". Et ils ont convaincu les associations antinucléaires de la région, le Réseau "Sortir du nucléaire", nos partenaires et soutiens, et vous tous qui nous avez rejoints dans ce pari. Au nom de toute l’équipe du Réseau "Sortir du nucléaire", nous tenons ici à les en remercier.

Une réaction en chaîne humaine pour sortir du nucléaire !

Grâce à eux, c’est une véritable réaction en chaîne humaine qui s’est engagée contre la réaction en chaîne1. Pour préparer cette grande mobilisation, des dizaines d’évènements et chaînes locales ont été organisés partout en France. Les partenaires ont afflué. Des associations comme Greenpeace et le syndicat Sud-Rail nous ont prêté main forte dans l’organisation. Nous avons swingué au son de Sanseverino, et des artistes tels que Karpatt, Les Fils de Teuphu ou Léoparleur ont ré-interprété, à leur manière, la chanson "Monsieur le Président", mise à notre disposition par la cohérie Boris Vian. Des scientifiques et des personnalités se sont associés à nous, à l’instar de Stéphane Hessel qui a appelé à s’insurger contre le nucléaire.

Et c’est un moment historique que nous avons vécu. Répartis sur 10 tronçons et emmenés par plus de 800 bénévoles (organisateurs de départs groupés, référents tronçons et parking, vendeurs ambulants, vigilants à vélo...), plus de 140 cars et 60 000 personnes, habitants de la vallée du Rhône ou militants venus de toute la France, ont déferlé sur la Nationale 7, formant ainsi la plus grande chaîne humaine jamais réalisée dans notre pays.

Ce dimanche 11 mars, nous nous sommes toutes et tous donné la main, en solidarité avec le Japon et pour montrer aux habitants de Fukushima qu’on ne les oublie pas. Et en déroulant cette chaîne humaine, nous avons montré que nous étions prêts à nous mobiliser par dizaines de milliers pour reprendre en main notre avenir énergétique. Un moment historique pour le mouvement anti-nucléaire qui marque un tournant pour notre lutte commune.

Des maillons supplémentaires partout en France

Au cours du week-end, nous avons également dénombré des dizaines d’évènements, organisés en écho ou en parallèle de cette grande action. Des débats, d’abord, comme aux Vans (07), à Flamanville (50) ou encore à Avignon (84), où une conférence, avec des intervenants venus de toute la France a permis d’apporter une information libre et objective sur l’ensemble de la problématique nucléaire. Des chaînes locales ensuite, rajoutant ainsi de nombreux maillons à la grande chaîne, à Alençon (61), Amiens (80), Angoulême (16), Arras (62), Bayonne (64), Bordeaux (33), Conflans Saint Honorine (78), Dijon (21), La Rochelle (11), Le Faou (29), Lille (59), l’Ile d’Yeu (85), Nantes (44) et Saint-Malo (35). Des rassemblements et manifestations de toutes formes, enfin, sur deux jours ou simplement de quelques minutes : à Cahors (46), Chalons-en-Champagne (51), Chaumont (52), Dieppe (76), Fécamp (76), Fessenheim (68), Fougères (35), Lannion (22), Le Havre (76), Montreuil (93), Metz (57), Niort (79), Paris (75) devant l’ASN, l’ambassade du Japon, à la gare du Nord ou encore devant l’Hôtel de Ville, Poitiers (86), Parthenay (79), Rouen (76), Saint-Nazaire (44), Vitré (35).

Dans l’ouest, on s’est également déchaîné contre les THT : à Ernée (53), Villedieu (50) et Lapenty (50), où des militants ont déboulonné des pylônes en construction de la ligne Cotentin-Maine. À 15h36, heure de la première explosion à Fukushima-Daiichi une onde des tambours s’est propagée dans plusieurs villes françaises. À Paris, aux alentours de midi, une dizaine de personnes a pris l’antenne de France Inter pendant quelques minutes, tandis qu’entre 19h55 et 20h00 le soir du 11 mars, 20 à 30 000 personnes ont, pendant 5 minutes, éteint leurs lumières contre le nucléaire.

Des manifestations et des commémorations... partout dans le monde !

Au-delà de nos frontières, l’appel à chaîne humaine a été entendu jusqu’en Amérique Latine : à Buenos Aires, Rio de Janeiro et Sao Paulo. Des manifestations et marches ont également eu lieu à Taïwan, à Oulan Bator en Mongolie, en Australie, en Suède, en Inde, aux États-Unis, en Pologne, en Suisse, en Belgique et en Espagne. En Grande-Bretagne, plusieurs centaines de militants ont occupé la centrale nucléaire désaffectée d’Hinkley Point. En Allemagne, 25 000 manifestants se sont rassemblés en 5 lieux du pays et autant de personnes ont formé une chaîne de lumière à proximité du centre d’enfouissement de déchets de Asse.

Un an après le triple accident qui l’a frappé, le Japon a quant à lui pleuré ses morts. Une minute de silence a été observée à 14h46, heure du déclenchement du séisme le 11 mars 2011. Des commémorations ont eu lieu dans tout le pays. Près de 14 000 Japonais ont encerclé la Diète (Parlement) pour protester contre l’inaction du gouvernement et demander une sortie totale du nucléaire. Et à 60 kilomètres de la centrale accidentée de Fukushima, 16 000 personnes, principalement des anciens habitants de la zone évacuée, se sont retrouvées dans un stade à Koriyama, en présence du prix Nobel de littérature Kenzaburo Oé, une des figures du mouvement antinucléaire nippon. Tous mus par une même conviction : le Japon, dont le dernier réacteur encore en marche sera arrêté pour maintenance au printemps, doit tirer un trait définitif sur le nucléaire.

Charlotte Mijeon et Laura Hameaux


Notes :

1 : Processus qui conduit l’énergie dans le cœur des réacteurs nucléaires.

Fukushima : une catastrophe qui ne fait que commencer

Il y a un an, débutait la terrible catastrophe de Fukushima. Un séisme, un tsunami et quatre accidents nucléaires majeurs ont frappé le Japon. Un an a passé, les médias se sont retirés, mais la catastrophe ne fait que commencer. Les réacteurs de la centrale de Fukushima-Daiichi ne sont toujours pas sous contrôle, ils continuent de disperser des radioéléments dans l’environnement, et restent à la merci d’un prochain séisme.

Dans la préfecture de Fukushima, l’"ennemi invisible" de la radioactivité est à l’œuvre ; pernicieux, silencieux, inodore, incolore... Et les conséquences vont rapidement se faire sentir. Des gravats radioactifs sont disséminés partout. Le sol, l’eau, les aliments, sont contaminés. On autorise à nouveau la vente de riz pollué par le césium-137 et les mesures prises pour protéger les enfants sont dérisoires.

Partout c’est l’électrochoc, sauf en France...

Dans le monde entier, la catastrophe de Fukushima a provoqué un électrochoc. Et très vite, plusieurs pays européens ont réagi : la Suisse a décidé de sortir du nucléaire ; l’Allemagne et la Belgique ont accéléré leur plan de sortie et l’Italie a confirmé par référendum qu’elle ne recourrait plus à cette énergie. À l’international, de nombreux projets de réacteurs ont été reportés ou annulés et les commandes d’Areva sont en berne.

Mais les responsables politiques français, eux, persistent et signent : il n’est pas question de toucher au fleuron de l’industrie française. Dans les jours qui ont suivi la catastrophe et tout au long de cette année, le lobby et le gouvernement ont multiplié les déclarations lénifiantes et mensonges éhontés sur la prétendue sûreté de nos centrales.

Réagir pour ne plus subir...

Face à ce déni et devant la surdité des responsables politiques, des habitants de la vallée du Rhône ont décidé de réagir. Réagir, pour ne plus subir. Pour la plupart, ils n’étaient pas des militants antinucléaires, mais ils vivent aux pieds des centrales et la catastrophe de Fukushima les a interpellés, elle les a profondément marqués. Ils se sont alors lancés dans un pari que tout le monde estimait fou : mobiliser tout autour d’eux tous ceux qui souhaitent un avenir sans nucléaire pour former une chaîne humaine sur 235 km, entre Lyon et Avignon, dans la région la plus nucléarisée d’Europe. Pour mener de front ce projet, ils se sont regroupés autour d’un collectif, la RECH : "réaction en chaîne humaine". Et ils ont convaincu les associations antinucléaires de la région, le Réseau "Sortir du nucléaire", nos partenaires et soutiens, et vous tous qui nous avez rejoints dans ce pari. Au nom de toute l’équipe du Réseau "Sortir du nucléaire", nous tenons ici à les en remercier.

Une réaction en chaîne humaine pour sortir du nucléaire !

Grâce à eux, c’est une véritable réaction en chaîne humaine qui s’est engagée contre la réaction en chaîne1. Pour préparer cette grande mobilisation, des dizaines d’évènements et chaînes locales ont été organisés partout en France. Les partenaires ont afflué. Des associations comme Greenpeace et le syndicat Sud-Rail nous ont prêté main forte dans l’organisation. Nous avons swingué au son de Sanseverino, et des artistes tels que Karpatt, Les Fils de Teuphu ou Léoparleur ont ré-interprété, à leur manière, la chanson "Monsieur le Président", mise à notre disposition par la cohérie Boris Vian. Des scientifiques et des personnalités se sont associés à nous, à l’instar de Stéphane Hessel qui a appelé à s’insurger contre le nucléaire.

Et c’est un moment historique que nous avons vécu. Répartis sur 10 tronçons et emmenés par plus de 800 bénévoles (organisateurs de départs groupés, référents tronçons et parking, vendeurs ambulants, vigilants à vélo...), plus de 140 cars et 60 000 personnes, habitants de la vallée du Rhône ou militants venus de toute la France, ont déferlé sur la Nationale 7, formant ainsi la plus grande chaîne humaine jamais réalisée dans notre pays.

Ce dimanche 11 mars, nous nous sommes toutes et tous donné la main, en solidarité avec le Japon et pour montrer aux habitants de Fukushima qu’on ne les oublie pas. Et en déroulant cette chaîne humaine, nous avons montré que nous étions prêts à nous mobiliser par dizaines de milliers pour reprendre en main notre avenir énergétique. Un moment historique pour le mouvement anti-nucléaire qui marque un tournant pour notre lutte commune.

Des maillons supplémentaires partout en France

Au cours du week-end, nous avons également dénombré des dizaines d’évènements, organisés en écho ou en parallèle de cette grande action. Des débats, d’abord, comme aux Vans (07), à Flamanville (50) ou encore à Avignon (84), où une conférence, avec des intervenants venus de toute la France a permis d’apporter une information libre et objective sur l’ensemble de la problématique nucléaire. Des chaînes locales ensuite, rajoutant ainsi de nombreux maillons à la grande chaîne, à Alençon (61), Amiens (80), Angoulême (16), Arras (62), Bayonne (64), Bordeaux (33), Conflans Saint Honorine (78), Dijon (21), La Rochelle (11), Le Faou (29), Lille (59), l’Ile d’Yeu (85), Nantes (44) et Saint-Malo (35). Des rassemblements et manifestations de toutes formes, enfin, sur deux jours ou simplement de quelques minutes : à Cahors (46), Chalons-en-Champagne (51), Chaumont (52), Dieppe (76), Fécamp (76), Fessenheim (68), Fougères (35), Lannion (22), Le Havre (76), Montreuil (93), Metz (57), Niort (79), Paris (75) devant l’ASN, l’ambassade du Japon, à la gare du Nord ou encore devant l’Hôtel de Ville, Poitiers (86), Parthenay (79), Rouen (76), Saint-Nazaire (44), Vitré (35).

Dans l’ouest, on s’est également déchaîné contre les THT : à Ernée (53), Villedieu (50) et Lapenty (50), où des militants ont déboulonné des pylônes en construction de la ligne Cotentin-Maine. À 15h36, heure de la première explosion à Fukushima-Daiichi une onde des tambours s’est propagée dans plusieurs villes françaises. À Paris, aux alentours de midi, une dizaine de personnes a pris l’antenne de France Inter pendant quelques minutes, tandis qu’entre 19h55 et 20h00 le soir du 11 mars, 20 à 30 000 personnes ont, pendant 5 minutes, éteint leurs lumières contre le nucléaire.

Des manifestations et des commémorations... partout dans le monde !

Au-delà de nos frontières, l’appel à chaîne humaine a été entendu jusqu’en Amérique Latine : à Buenos Aires, Rio de Janeiro et Sao Paulo. Des manifestations et marches ont également eu lieu à Taïwan, à Oulan Bator en Mongolie, en Australie, en Suède, en Inde, aux États-Unis, en Pologne, en Suisse, en Belgique et en Espagne. En Grande-Bretagne, plusieurs centaines de militants ont occupé la centrale nucléaire désaffectée d’Hinkley Point. En Allemagne, 25 000 manifestants se sont rassemblés en 5 lieux du pays et autant de personnes ont formé une chaîne de lumière à proximité du centre d’enfouissement de déchets de Asse.

Un an après le triple accident qui l’a frappé, le Japon a quant à lui pleuré ses morts. Une minute de silence a été observée à 14h46, heure du déclenchement du séisme le 11 mars 2011. Des commémorations ont eu lieu dans tout le pays. Près de 14 000 Japonais ont encerclé la Diète (Parlement) pour protester contre l’inaction du gouvernement et demander une sortie totale du nucléaire. Et à 60 kilomètres de la centrale accidentée de Fukushima, 16 000 personnes, principalement des anciens habitants de la zone évacuée, se sont retrouvées dans un stade à Koriyama, en présence du prix Nobel de littérature Kenzaburo Oé, une des figures du mouvement antinucléaire nippon. Tous mus par une même conviction : le Japon, dont le dernier réacteur encore en marche sera arrêté pour maintenance au printemps, doit tirer un trait définitif sur le nucléaire.

Charlotte Mijeon et Laura Hameaux


Notes :

1 : Processus qui conduit l’énergie dans le cœur des réacteurs nucléaires.



Soyez au coeur de l'information !

Tous les 3 mois, retrouvez 36 pages (en couleur) de brèves, interviews, articles, BD, alternatives concrètes, actions originales, luttes antinucléaires à l’étranger, décryptages, etc.

Je m'abonne à la revue du Réseau